« Affluence galiléenne» pour ce petit déjeuner du 10 juin avec Jean-Marie Fessler sur le thème
NUMERIQUE, ACTION PUBLIQUE ET SANTE : POUR QUEL TISSAGE ?
Catherine Gras, Présidente du conseil d’orientation, accueille les participants…
… Gilbert Deleuil, Président du conseil d’administration, rejoint le groupe ; on se salue via le bouton « converser » de l’application « Zoom »…
… et lorsque tout est prêt, la parole est donnée à l’intervenant.
Nous reproduisons ci-après l’intégralité du texte de l’intervention de Jean-Marie Fessler.
Bonjour à toutes et tous.
Je dois à l’amitié de Catherine GRAS et au président Gilbert DELEUIL de pouvoir échanger ce matin avec vous.
Je souhaite saluer et remercier celles et ceux qui sont sur le pont, depuis trois mois, professionnels de santé et de soutien.
Pendant une moitié de ma vie professionnelle, j’ai été directeur d’hôpital puis des établissements de soins de la Mutuelle générale de l’Education nationale. L’autre moitié, représentant les hospitaliers publics et privés, j’ai participé à l’élaboration de la carte de professionnel de santé (CPS), en lien avec la carte VITALE. J’ai été expert au Comité européen de normalisation, co-fondateur d’une entreprise et conseiller du président de la MGEN. En même temps, j’ai toujours enseigné, notamment à l’Essec.
Je suis président du conseil scientifique de l’Institut mutualiste Montparnasse, membre des Cercles Entreprises et Santé et K2, de l’Académie d’éthique aussi.
Ma thèse de doctorat en éthique médicale de 1997 portait sur « Infoéthique et santé publique » et celle d’économie de la santé de 2006 sur « Contribution à l’économie des crises. La Crise à l’hôpital ? ». J’ai été auteur ou co-auteur de douze livres, nés des équipes de terrain.
Enfin, j’ai eu l’occasion de travailler un peu ou longtemps dans 24 grandes villes de 17 pays et quatre continents. Depuis 2005, je suis professeur associé de Stanford, en charge d’un enseignement trimestriel sur la santé globale .
Numérique, action publique et santé : pour quel tissage ?
Je remercie Catherine GRAS pour nos échanges sur le numérique et l’action publique.
Quant aux liens entre santé et numérique, je tiens à citer deux de mes maîtres : le Dr. Pierre FRUTIGER, médecin et informaticien, et le Pr. François GREMY (1929-2014), l’un des fondateurs de l’informatique médicale et de la santé publique.
Je déclare n’avoir aucun conflit d’intérêts.
Je vous prie d’excuser certains raccourcis. J’ai largement conservé la forme orale.
Quelques faits mondiaux, d’abord.
- 4 milliards d’internautes, un doublement en 8 ans.
- 3 milliards d’utilisateurs actifs de réseaux sociaux.
- 3 millions de courriels par seconde.
- 5 000 publications scientifiques par jour.
- On grave 20 milliards de transistors sur une puce de la taille d’un ongle.
- Les films vidéo constituent la moitié du trafic sur internet.
- 5 milliards d’utilisateurs d’un téléphone mobile.
- 1,7 milliard de sites Web.
- 22 milliards d’objets connectés sur internet.
- La publicité en ligne : 350 milliards d’euros.
- En compétitivité numérique, la France est au 24ème rang.
- En produit intérieur brut par habitant, au 21ème. Avant la pandémie.
- Etc….
Nous étions prévenus.
Les futurologues Alvin (1928-2016) et Heidi TOFFLER [1] écrivait en 2007 : « Nous vivons, en réalité, le bouleversement le plus profond du système mondial du savoir depuis que notre espèce a commencé à penser. Tant que nous n’aurons pas digéré ce fait, tous nos projets les plus élaborés pour l’avenir tourneront court. » La richesse révolutionnaire, p. 162.
Il se transporte mieux que tout autre produit.
Tout le monde peut utiliser le savoir sans l’appauvrir. Le savoir est relationnel.
Les bénéficiaires des anciens modes d’organisation en spécialités résistent.
Education parentale, soins personnels, bénévolat associatif pour 13 millions d’entre nous, logiciels libres, jeunes pousses, cours en ligne ouverts et massifs, Wikipedia, un bien commun numérique, l’encyclopédie libre que chacun peut améliorer, financement participatif, constituent une économie invisible.
Deux dates symboliques.
Le 29 octobre 1969 est la date de la première connexion entre deux ordinateurs distants de 500 kilomètres de l’université de Californie à Los Angeles et de l’Institut de recherche de Stanford, près de San Francisco.
L’objectif est de mieux organiser la recherche et d’utiliser le même ordinateur central, très coûteux, sans se déplacer. Ce premier message : « L » « O » puis « LOGIN », s’identifier.
Le 6 août 1991, au Comité Européen pour la Recherche Nucléaire, le britannique Timothy John BERNERS-LEE (1955-) et le belge Robert CAILLIAU (1947-) mettent en ligne le premier site internet.
La gratuité de cette technologie est décidée en 1993.
L’ère numérique repose sur la conversion des informations d’un support, texte, image, audio, vidéo, en données numériques que des dispositifs informatiques et d’électronique peuvent traiter.
Les contributions au développement de l’Ere numérique sont plurielles.
Les infrastructures vitales.
D’abord, internet squatte le réseau téléphonique cuivre.
Il faut mentionner les cables aériens, souterrains, maritimes, enjeux géostratégiques.
Le premier microprocesseur est commercialisé en 1971 par INTEL. Dans un ordinateur, sa fonction est d’exécuter les instructions et de traiter les données des programmes.
Les pionniers sont des ingénieurs-inventeurs-entrepreneurs.
- En 1973, Martin COOPER, ingénieur chez MOTOROLA, crée le premier téléphone mobile.
- En 1974, le français Roland MORENO dépose les brevets d’une carte à mémoire.
- D’autres contributeurs français sont en particulier François GERNELLE (1944-), ingénieur du Conservatoire national des arts et métiers, inventeur du premier micro-ordinateur en 1973, et Louis POUZIN (1931-), polytechnicien, l’un des pères de l’internet. Louis POUZIN et François FLUCKIGER, ingénieur de Supélec, sont les deux français lauréats du Temple de la renommée d’Internet. Ils ont été ignorés par les élites dirigeantes nationales.
- En 1975, Bill GATES fonde MICROSOFT avec Paul ALLEN.
- En 1976, Steve JOBS (1955-2011) et Steve WOZNIAK créent APPLE.
- En 1980, à titre de test, 2 000 foyers français sont raccordés au MINITEL, terminal passif.
- En 1981, IBM lance son premier PC, équipé du logiciel MS-DOS de MICROSOFT.
- En 1984, APPLE lance le MACINTOSH et la révolution de l’ordinateur personnel.
- En 1995, le GPS, géo-positionnement par satellite, couvre la planète. Il est accessible gratuitement au public.
- En 1998, Sergey BRIN et Larry PAGE, étudiants de Stanford, créent le moteur de recherche GOOGLE.
- En 2004, Mark ZUCKERBERG, étudiant de Harvard, lance le réseau social FACEBOOK. C’est aussi la naissance de SKYPE, en Estonie.
- Outre l’IPHONE en 2007, APPLE inaugure en 2010 l’ère de la tablette, l’IPAD. Etc.
Des ingénieurs-inventeurs-entrepreneurs, donc. Et deux absences criantes : celle des femmes et celle des arts.
Lors des vingt dernières années du XXème siècle, la mutualisation la plus large a fait le reste. Sans enseignement en informatique.
En France, dans le secondaire, le modeste enseignement optionnel de programmation qui existait a été supprimé en 1997. L’informatique était considérée comme une mode passagère !
Une génération perdue. Cette année, on introduit en seconde un enseignement « Sciences numériques et technologie ».
Personne n’a contrôlé, dirigé ni financé ce processus d’apprentissage et ce progrès social non mesurable.
Nous avons toutes et tous été autodidactes, généralement à nos frais.
Le marché est celui de notre attention. Jusqu’à l’infobésité.
Diversités, interdépendances, polémiques, conservatismes et aspirations exacerbés nous rendent la vie parfois difficile.
Catherine GRAS évoque souvent un besoin urgent de « sas de décompression », d’« espaces débranchés, numériquement vierges ».
Par rapport aux « coalitions provisoires de volontaires » pour atteindre des objectifs précis, nos modes verticaux et hiérarchisés d’organisation sont en retard, bien sûr.
Toujours est-il que jamais dans l’Histoire, on n’a rencontré plus de personnes instruites et décidées à améliorer leur sort et le monde.
Toujours est-il que nous sommes contemporains du passage d’une valeur dépendant des machines et des matières premières à une autre dépendant des idées, des images, des symboles et des modèles à l’intérieur de milliards de cerveaux.
Au niveau des gouvernants, trois illustrations.
Le 21 décembre 1993, le vice-président des Etats-Unis, Al GORE, lance le programme des « autoroutes de l’information ».
Président de l’Union Indienne, de 2002 à 2007, Abdul KALAM (1931-2015) lance le programme « villages connectés ». Il s’agit de 600 000 villages.
Le 10 septembre 2014, le premier ministre chinois LI KEQIANG lance le programme « entrepreneuriat et innovation de masse ». Maires, entreprises et fonctionnaires s’attachent à relever le défi.
Aujourd’hui, l’Avenue des entrepreneurs, à Beijing, est la seule concurrente puissante de la Silicon Valley. Dans chacune, des milliers d’entreprises.
Les deux premières décennies du XXIème siècle ont plutôt été celles de la monétarisation de nos vies.
A des degrés divers, les géants du numérique, GOOGLE (1998), APPLE (1976), FACEBOOK (2004), AMAZON (1994), MICROSOFT (1975) – les GAFAM -, BAIDU (2000), ALIBABA (1999), TENCENT (1998), XIAOMI (2010) – les BATX -, se servent des informations personnelles fournies par les utilisateurs.
En retour, ils procurent des services, souvent gratuits.
Ils façonnent des profils qu’ils vendent aux publicitaires et développeurs d’applications qui sont alors en mesure de cibler les offres.
Il y a 180 millions de produits référencés sur les sites d’e-commerce d’Amazon.
Aujourd’hui, les GAFAM pèsent 4 fois le CAC40.
Ce rappel ne vaut en rien soumission aux exaltations transhumanistes et à la rhétorique de l’intelligence artificielle. Nous savons à quel point les « hommes nouveaux » ont détruit dans l’Histoire. Pour ma part, je n’utilise que l’expression d’intelligence augmentée, plus réaliste et respectueuse de notre humanité.
Que les démocraties soient fragilisées n’échappe guère.
Conflits des images, récits, communautés, générations, légitimités, libertés, idéologismes et extrémismes, etc., se multiplient.
Lourd constat lorsqu’il s’agit de relever les défis climatiques, sanitaires, socio-économiques.
Face à des mutations ultra-rapides, le rythme des institutions est décalé. Le désir de participation aux décisions publiques se heurte à la temporalité du système électoral représentatif.
Des milliards de citoyens utilisateurs actifs des applications et dispositifs numériques sont devenus l’enjeu de confrontations de certains Etats entre eux et avec quelques géants industriels.
Peut-on souligner qu’entre technophiles, technophobes, maîtres du soupçon, techniciens de la prise du pouvoir et propagandistes d’intérêts privés, institutionnels ou encore d’egos, les citoyens qui tentent de résister aux aliénations et aux dérives de nombre de donneurs d’ordres n’ont guère été encouragés par une métamorphose de la pensée culturelle, politique et sociale qui aurait dû accompagner les débuts de l’ère numérique ?
Nous appuyer sur les origines mutualistes de la révolution numérique pourrait être de bonne pratique.
A trop vouloir nous soumettre, nous apprendrons à nous déconnecter, massivement. C’est arrivé à Facebook, en 2018.
Que mettre à l’agenda permanent de nos vies démocratiques et de l’action publique ?
- La cybersécurité. Je ne peux que recommander de suivre les préconisations de l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information, sur son site. La prochaine pandémie pourrait bien être numérique, sous la forme d’une cyberguerre. Pour mémoire, en 2017, 19 millions de Français auraient été volés de 6 milliards d’euros.
- La lutte contre les nouveaux trafics sur l’internet clandestin.
- La maintenance des réseaux techniques, des outils et des applications.
- L’infoéthique des algorithmes : une éthique des pratiques et non une cosméthique. L’épistémologie est impliquée.
L’UNESCO évoque l’infoéthique depuis 1998. Sous un épais silence.
- La déstabilisation psychologique de nombre d’usagers par le complotisme, les fausses informations et le caractère autoritaire répétitif ou infantilisant de messages véhiculés par certains sites d’usage parfois imposé.
- L’avenir des emplois dans un environnement qui fait la promotion de la disruption tous azimuts.
Faut-il rappeler qu’un tiers seulement des travailleurs dans le monde bénéficie d’une forme de protection sociale ?
La Covid-19 a sans doute détruit 200 millions d’emplois, dans le monde. Dix ans de lutte contre la misère viennent d’être perdus.
L’Ere numérique produit à la fois des connexions et des déconnexions.
Quelques initiés prétendent avoir les bonnes visions de l’avenir de toutes et tous, au détriment de formidables initiatives citoyennes et territoriales dont la puissance est proportionnelle à la solidité des ancrages territoriaux, à la conscience des situations réelles, à la crédibilité et à l’exemplarité des messagers. Les fonctions publiques et l’économie sociale et solidaire ont toute leur place dans un rééquilibre des liens entre les mots et les actes.
A défaut, on peut aisément imaginer l’exacerbation des clivages traditionnels, maîtres et esclaves, seigneurs et serfs, commissaires politiques et prolétaires, tenants de supériorités multiples par rapport aux autres, caste, tribu, religion, race, nation, fortune, âge, diplôme, etc.
Si cette dimension est négligée, le prochain défi pourrait être celui de « dieux» issus de synergies entre biotech et infotech face à des « inutiles », tous les autres qui ne seront ni dotés des mêmes facultés et pouvoirs ni dopés : un scénario d’apartheid mondialisé.
Le temps des jeunes derrière leurs écrans devient supérieur au temps scolaire. Cette addiction a des conséquences : santé, obésité, agressivité, manque de concentration, etc. L’influence massive sur le Web et les réseaux sociaux n’est pas celle des meilleurs savants, soignants, bâtisseurs et sages.
La formation à la critique constructive des enfants et des citoyens demande de l’entraînement. Elle engage nos familles et nos écoles.
Il serait temps de synthétiser ce qu’il est indispensable de vraiment connaître, dans tous les domaines, afin de pouvoir vivre.
C’est un véritable combat démocratique et préventif.
Afin de le mener utilement, la parole doit mieux circuler entre celles et ceux qui ont un mandat électif, les hauts fonctionnaires, les entrepreneurs, les enseignants, les chercheurs, les innovateurs et les citoyens.
En particulier, nous devons toutes et tous nous méfier des tunnels mentaux induits par le maniement expert de terminologies spécialisées qui servent de signaux d’appartenance mais aussi d’exclusion.
Un travail particulier sur nos propensions individuelles et collectives à la myopie, l’amnésie, l’inertie, les simplifications sélectives et le suivisme semble nécessaire.
En France ? Quelques faits.
Le modèle du retard semble de tradition. Sans doute depuis la Révocation de l’Edit de Nantes par Louis XIV, en 1685.
En 1939, le taux de pénétration de la radio hertzienne est de 12%. Le double, aux Etats-Unis. En France, les radios sont taxées dès 1934.
Avec 10 000 abonnés, la loi de 1889 nationalise le téléphone en France. En 1954, son taux de pénétration atteint celui des Etats-Unis en … 1900.
Pour la télévision, en 1960, le taux d’équipement par habitant est dans un rapport de 1 à 5 avec les Anglais et de 1 à 2 avec les Allemands.
On pourra toujours se rassurer en soulignant qu’il y a eu rattrapage. Mais à quel prix, usure du corps social comprise ?
L’Etat, France TELECOM, FREE et d’autres ont mieux joué pour Internet.
Le très haut débit et la fibre optique jusqu’au domicile posent encore problème.
Les plans n’ont pas manqué : Calcul, Téléphone, Câble, Vidéocommunication de Biarritz, Informatique pour tous, Quaero, Géoportail, Andromède, Dossier médical partagé (DMP), Fibre optique, Galileo, etc.
Il s’agissait souvent de contrer les Américains : « Faire mieux que » les Macintoshs, Google Maps, GPS, Cloud, IBlueBotton, le dossier médical personnalisé mobile pour les américains conçu par … le Dr. Bettina EXPERTON, française. Sa proposition à son pays, le nôtre, n’a pas été reçue, à la différence des Etats-Unis et du Royaume-Uni.
Il est vrai que Microsoft gère les ministères de la Défense et de l’Education nationale.
Nous ne sommes guère à une contradiction et à des milliards d’euros gaspillés près. Le seul échec du Dossier médical partagé (DMP) de 2004 à 2018 aurait coûté de l’ordre d’un milliard et demi.
On pourrait évoquer d’autres chantiers : LOUVOIS, ANTS, APB, SIRHEN, ONP, GENESIS [2]…
Qu’en est-il de la transparence sur ces mésusages de l’argent public ?
Dans ce domaine comme dans d’autres, le constat est identique : une contradiction entre des atouts nationaux proclamés et le gâchis réel.
Il n’est qu’à demander aux infirmières des plus grands hôpitaux publics de notre pays ce qu’elles vivent depuis vingt ans, derrière leurs écrans. Leur a-t-on posé la question ? Leurs réponses ont-elles été prises en compte ?
En France, les blocages défiants sont multiples : la dépendance aux financements publics, l’instabilité fiscale et réglementaire qui décourage les financements privés et le capital risque, la pression des entreprises traditionnelles, l’organisation du travail, etc.
Sur le terrain, tout ceci est connu depuis des lustres.
Comme d’ailleurs les meilleures pratiques : des cahiers des charges finalisés avec les futurs usagers des applications, le traitement et l’usage intelligents des données, l’interopérabilité, le pilotage en ligne, etc.
Ne rien changer c’est continuer à creuser notre dépendance et à déplorer que les meilleurs enrichissent les pays qui les accueilleront.
On ne peut que souhaiter un autre sort à celles et ceux qui innovent sur les « briques » à venir de l’Ere numérique.
On peut en lister certaines : blockchain, voiture autonome, ciseau génétique, drone, e-santé, bio-impression, Apprentissage profond et intelligence augmentée, robots de services, internet des objets connectés, ordinateur quantique, exosquelettes, Technologie civique, disruption des langues, etc.
Je vous soumets certaines problématiques.
- Le numérique est culturel et politique. Il « interroge » les rapports de pouvoir, les boîtes noires institutionnelles, les capacités de faire ensemble et les élites dirigeantes sur la manière dont elles ouvrent ou pas le « prenez place » à d’autres qu’à leurs membres.
- Il « interroge » l’avenir des emplois, y compris les plus qualifiés.
- Les suites de l’Ere numérique doivent être féminisées.
- Il manque encore à l’Internet son récit humaniste, ses poètes et ses artistes.
- Il manque à la démocratie l’organisation partagée de sa défense.
- La révolution de l’intermédiation, des services et des usages relève sans doute d’une autre politique que celle de la seule taxation des géants du numérique.
Elle appelle des expériences et un soutien de révolutions tranquilles qui feront naître d’autres manières d’habiter le temps, l’espace, le savoir, le travail, la vie. A condition d’entendre que la vie vivante ne procède pas de la dérogation.
Sous la condition sine qua non d’une pratique de l’interactivité, nous avons beaucoup à gagner dans le mouvement d’un Etat qui accueillerait mieux les initiatives et propositions citoyennes.
Au VIème siècle avant notre Ere, HERACLITE définissait l’éthique comme la manière dont l’homme habite le monde.
Il s’agit bien de cela : l’Ere numérique doit compléter ses contributions positives au développement par la démonstration qu’elle rend plus habitables le monde et les relations entre les personnes.
Sous forme de transition avec le développement sur le couple Santé et numérique, quelques mots sur l’Université STANFORD.
Si l’on additionnait toutes les sociétés créées par des anciens de Stanford, elles formeraient la 10ème économie mondiale. Comment est-ce arrivé ?
3 histoires vraies.
A la suite de la mort en 1884 de leur fils unique de 15 ans, à cause de la typhoïde, Leland (1824-1893) et Jane STANFORD (1828-1905) ont voulu créer une université et un hôpital non profit – dont l’adresse principale est Pasteur Drive. Leland STANFORD était un industriel, gouverneur et sénateur de Californie. « Les enfants de Californie seront nos enfants », s’exprimèrent-ils.
A Stanford, les frais de scolarité sont gratuits pour les familles dont les revenus sont inférieurs à 125 000 $ par an. Pour celles dont les revenus sont inférieurs à 65 000 $, il en va ainsi des frais de scolarité et d’hôtellerie.
Professeur au département d’ingénierie électrique dans les années 1930 et troublé par l’absence d’emplois de proximité pour les diplômés de Stanford, Frederick TERMAN (1900-1982) a pu convaincre en 1939 deux de ses étudiants, William HEWLETT et David PACKARD, de créer leur entreprise en Californie. Il leur a donné une bourse.
La séquence [industrie des tubes à vide – laboratoire d’électronique – semi-conducteurs solides – circuits intégrés – applications] a été déterminante et aussi le statut d’établissement privé à but non lucratif et le rôle actif des anciens élèves.
Aujourd’hui, le bureau des licences de technologie reçoit 250 inventions des étudiants et des professeurs par an.
Quant à la Silicon Valley, elle s’est développée sur des terrains vierges prêtés par l’Université.
Le vent de la liberté souffle, telle est la devise de Stanford. L’ouverture d’esprit aussi.
Troisième histoire, personnelle.
Mon cours trimestriel sur la santé globale est évalué par les étudiants. Telle est la contrepartie de mon droit à noter leurs travaux et à influer sur leur avenir.
Un cours est un échange. Les étudiants arrivent en ayant lu supports et lectures obligatoires.
Parce qu’il évoquait la France dans son enseignement, le Pr. Gregory ROSSTON, directeur du programme de politique publique de Stanford et ancien conseiller du Président Barack OBAMA, m’a demandé en 2018 si j’acceptais de faire cours avec lui. Quel souvenir !
Santé et numérique…
Le monde de la santé met en mouvement des attentes humaines très fortes et des relations particulières avec les professionnels de santé.
En France, la santé relève de l’Etat. Qu’il s’agisse de l’accès équitable à des soins de qualité, des professions de santé qui sont réglementées par le code de la santé publique, de la solidarité et de l’assurance maladie obligatoire et complémentaire, la légitimité et l’autorité de l’Etat prévalent. Toutes les activités médicales sont soumises à l’autorisation des Agences régionales de santé.
Au demeurant, la santé et la maintenance de son propre corps, psychisme compris, relèvent de chacune et chacun, au quotidien.
La médecine et les soins représentent l’effort multimillénaire de l’humanité pour se connaître elle-même et faire face aux dangers – épidémiques, notamment – qui mettent en cause la survie. Nous avons la chance d’accéder à un tel héritage.
Depuis cinquante ans, la numérisation gagne progressivement tous les domaines et tous les métiers. La santé en bénéficie déjà largement, en biologie, imagerie et chirurgie.
Les prochaines étapes sont connues et symbolisées par l’expression de médecine 5 P : Personnalisée, Préventive, Prédictive, Participative et Pertinente. Un nombre croissant de capteurs et d’objets connectés, enregistrant des paramètres biologiques, aident au dépistage, à l’alerte, au coaching.
Les questions portant sur la fiabilité, la confiance, la dépendance ou l’intrusion sont souvent et normalement évoquées.
Les industriels, les associations de patients et les Etats ont intérêt à ce que les travaux internationaux de normalisation permettent de prévenir les contrefaçons. Ainsi, les faux médicaments tuent des centaines de milliers de malades chaque année. Cette criminalité relève encore du simple délit de violation de la propriété intellectuelle.
Face à une myriade d’applications, je vais seulement tenter de vous soumettre quelques réflexions.
Systèmes d’information de santé et hospitaliers, logiciels d’aide à la prescription, dossier médical et soignant du patient, télésanté… Le Pr. Louis LARENG (1923-2019), co-inventeur du SAMU et de la télémédecine doit être cité. On ajoutera la santé mobile, la radiologie interventionnelle, la robotique chirurgicale, l’e-pharmacie.
Cela bouleverse la médecine et permet une amélioration des prises en charge et de l’efficience thérapeutique. L’intelligence augmentée y contribue. L’apport du français Yann LE CUN y est majeur.
L’immunothérapie, la stimulation cérébrale profonde, la production de nouvelles molécules antivieillissement, les imprimantes 3D et les nanothérapies, les thérapies cellulaires et les cellules souches, les implants visant à réparer la perte de l’audition, de la vision et de la mémoire, font progresser dans la précocité et la précision diagnostics, thérapeutiques, médicaments et compensations de situations de handicap. Qu’il s’agisse des 7 000 maladies rares identifiées à ce jour et qui touchent trois millions de personnes en France, des maladies d’origine environnementale et des troubles de la santé mentale, le numérique est partie prenante des progrès de la compréhension, de la prévention et de l’action.
Pour tenter véritablement une approche du numérique en santé, il faudrait a minima essayer de nous situer dans une forme de vérité des perspectives.
Les perspectives du corps humain, d’abord, en quelques données.
Notre cerveau comporte 80 milliards de neurones. Il « pilote » 1 000 milliards de connexions nerveuses. Notre cœur bat 100 000 fois par jour, pompe 5 litres de sang par minute, à la vitesse de 2 kms/h, à travers un réseau de veines, artères, capillaires de plus de 100 000 kilomètres. Notre corps est renouvelé tous les quinze ans. On précisera que nous avons entre 90 et 110 milliards d’ancêtres et que seuls 2% de nos gènes peuvent expliquer la différence entre notre espèce et celle des chimpanzés !
Les perspectives de la médecine s’appuient sur l’effort cinq fois millénaire de l’humanité pour se connaître elle-même. Effort des Assyriens et des Chinois, des Grecs et des Romains, des Arabes et des Européens, du monde entier aujourd’hui.
L’exemple signifiant est SNOMED-CT, la plus vaste nomenclature médicale et clinique qui comporte de l’ordre de 400 000 concepts codés. La précision des termes soutient celle des diagnostics posés et des thérapeutiques mises en œuvre. En retour, elle en bénéficie.
On doit au français le Dr. Jacques BERTILLON (1851-1922) la première Classification des causes de décès, en 1893, dont la 6ème révision deviendra la Classification internationale des maladies, sous l’autorité de l’Organisation mondiale de la santé.
Les administrations nationales concernées n’ont pas voulu que la France contemporaine participe aux travaux de construction de SNOMED-CT, depuis 1975, alors que 39 pays dont 22 en Europe y coopèrent.
Cette politique de la chaise vide vaut absence de tous les comités internationaux de normalisation en matière de numérique en santé et donc d’interopérabilité.
Enfin, les perspectives des capteurs chimiques et électromagnétiques, des biocapteurs et biopuces et des liens entre eux et de multiples équipements ouvrent la possibilité de travailler à proximité de l’échelle cellulaire.
Ce qui précède incite à questionner la pertinence des programmes du Health Data Hub (HDH) ou plateforme des données de santé, instrument de l’Etat, et du Dossier médical partagé (DMP).
Prétendre améliorer la connaissance générale du système de santé à partir de nos données de santé semble bien distant des attentes sociales : mieux soigner les maladies orphelines, la maladie d’Alzheimer, les cancers, etc.
Faute d’avoir écouté les rares véritables experts du domaine, le DMP annoncé en 2004, rendu obligatoire en 2007, relancé en 2018 par la CNAM, pose toujours problème.
Contribuable et cotisant, je m’autorise quelques questions.
Qu’en est-il des messages standards qui servent à échanger les données entre logiciels ? La norme européenne est-elle privilégiée ? Quelle est la valeur ajoutée du DMP, et plus globalement du HDH, par rapport aux systèmes de gestion documentaire, sous PDF (Portable Document Format) ?
Toujours est-il que suite au volet numérique de la loi du 24 juillet 2019, l’ouverture du dossier médical partagé sera automatique au 1er juillet 2021.
Espérons qu’il constituera bien un espace de travail commun aux professionnels de santé.
Ce serait une heureuse rupture avec le nec plus ultra national de la maîtrise des dépenses de santé : contraindre les médecins à faire converger leur patientèle avec des données statistiques et des recommandations de hautes autorités, sous numerus clausus instauré par la loi du 30 juin 1971 et dont nous payons toujours la période d’application la plus brutale, de 1985 à 2003. Aujourd’hui, la moyenne d’âge des médecins en exercice est de plus de 50 ans. Espérons aussi que les équipes sélectionnées de chercheurs qui auront accès à nos données anonymisées pourront en extraire de quoi nourrir des innovations et connaissances essentielles.
Citoyens, ne sommes-nous pas en droit d’attendre que les cellules descriptionnelles minimales des instructions des pouvoirs publics et tutelles ainsi que les construits intérieurs à partir desquels ingénieurs, techniciens, consultants et conseillers conçoivent les applications et les façons de faire soient explicités ? La clarté des buts est cruciale.
Seul un rapprochement princeps avec les réalités vécues semble permettre une appropriation équilibrée de tels programmes.
A défaut, on pourrait s’interroger : l’ambition numérique … de qui ?
Ne s’agirait-il que d’appliquer les prescriptions top-down d’autorités multiples, dans un esprit d’adaptation et de soumission de nos vies à une extrême rationalisation, un pliage algorithmique ?
Pour quelques « happy fews » l’exaltation numérique ; pour tous les autres l’anxiété informationnelle inhérente à de nouvelles exigences imposées à nos existences.
Pour les médecins et soignants des établissements publics de santé, privés d’intérêt collectif, privés et de ville, peut-on espérer que la pandémie aura au moins permis de travailler sur d’autres bases, demain ?
Pendant ce temps, la réforme de l’Etat et des administrations, toujours évoquée, est peu mise en œuvre, en dépit d’efforts aussi remarquables que ceux de GALILEE.SP.
En sus des Agences régionales de santé, le ministère de la santé dénombre 34 autres agences et opérateurs, etc.
Force est de constater que l’histoire du numérique révèle au grand jour des contradictions de moins en moins supportables.
Alors même que plus de trois Français sur quatre sont prêts à communiquer par courriels, SMS et visioconférence avec leurs médecins. Pour leur part, plus de 80 % des médecins estiment que la santé connectée peut contribuer à la qualité des soins.
Nous ne pouvons connaître ni le réel en soi ni le réel numérique dans son entièreté. Soit. Nous procédons donc au travers de grilles de qualification. La seule manière de les construire et de les appliquer de manière librement consentie relève d’une démarche bottom-up et d’une grande clarté sur les buts.
Sans pouvoir développer ici ce qui l’a été maintes fois, à partir de l’expérience de plusieurs hôpitaux universitaires, force est de constater que le principal système d’information national en santé, celui qui gouverne le financement, la tarification à l’activité (T2A) pour les hôpitaux et les cliniques et la classification commune des actes médicaux (CCAM) tarifante pour la médecine de ville, est en échec.
Comment peut-on vertement reprocher aux médecins de négliger la coopération, la prévention, les maladies chroniques, la nécessaire maîtrise des dépenses, etc., alors que la T2A ne paie que la production d’actes et de séjours courts ? Les hôpitaux comme la médecine de ville souffrent quotidiennement des incohérences des tarifs entre eux. Ceci se joue malade par malade, discrètement. De longues années de travail et d’expérience de ce domaine ne laissent pas de doute sur cette entreprise de lissage du Réel : le laminoir de 3 000 groupes de séjours fabriqués avec un algorithme fruste et de leurs tarifs largement calculés au prorata de la durée de séjour. En 2020, on risque de continuer avec une future tarification-à-la-qualité qui n’existe nulle part, les praticiens sachant depuis longtemps qu’un indicateur transformé en objet de rémunération perd toute valeur.
Il aurait été trop simple de constituer une plateforme d’échanges permettant d’éviter gaussiennes et corrélations forcées, de partager les voies d’amélioration du « groupage » et du calcul des coûts et des tarifs et une intelligence collective de la maîtrise des dépenses.
Nous avons démontré naguère qu’une alliance forte entre médecins, soignants, ingénieurs, comptables, directeurs et des instruments de test de la diversité des propositions permettaient de relever les défis présentés par de grandes complexités.
A l’inverse, imaginer que les professionnels de santé puissent être gouvernés par télécommande, impulsion, accompagnement, n’est guère respectable et prudent.
On pourrait penser qu’une étrange chimie des sentiments s’est attachée à détruire la réussite issue de l’alliance mondiale entre la médecine, d’autres sciences et des contributions industrielles déterminantes, depuis bientôt un siècle.
Si nous voulons que la qualité des données s’améliore, encore faut-il que les pouvoirs publics respectent ceux qui les collectent. Les équipes hospitalo-universitaires qui ont loyalement construit des bases de données à leur demande ont constaté que le retour a consisté en procédures obligatoires, analyses réductionnistes et abandon de séries historiques de données particulièrement précieuses et difficiles à constituer.
Bref, il aurait fallu comprendre que l’on n’attendait rien d’autre du « terrain » que de cautionner, le plus discrètement possible.
Ces pratiques qui sont le fait, depuis plus de trente ans, des mêmes quelques personnes qui s’estiment plus intelligentes que deux millions de professionnels du monde santé social, sont hors-d’âge.
Elles reviennent à refuser aux professionnels de contribuer à une co-construction minimale d’une histoire collective. De quel droit ?
Saisir un résumé médical, coder, recouper, soigner une nomenclature et des données comptables, dessiner un algorithme, vérifier les résultats, les soumettre à la réaction des prosommateurs de ces données, ajuster, faire évoluer, ne sera jamais trivial ni bureaucratique. Pendant ce temps, l’IA créative et les développements des convergences entre les nanotechnologies, les biotechnologies, l’informatique bientôt quantique et les sciences cognitives séduisent les meilleurs.
L’un des enjeux est de générer des nouvelles connaissances qui feront évoluer celles des utilisateurs, à la différence des algorithmes basés sur un réseau de règles aboutissant aux conclusions du déjà pensé. Le mouvement collaboratif nommé Web sémantique s’attache à extraire le meilleur des données.
En santé, il devrait y avoir un large débat épistémologique et éthique sur le poids des formalismes et les dérives de l’instrumentalisation qui poussent au transfert de la capacité de penser du médecin à l’emploi de protocoles généralisés.
Des constructions abstraites – frontières artificielles, pliages algorithmiques, groupes homogènes – préemptent les comportements. Pensée unique, Histoire vidée de ses histoires, management basé sur des représentations tronquées sont des violences faites aux métiers.
Ce qui précède nous incite à faire une proposition d’élémentaire prudence à celles et ceux qui travaillent au service de l’action publique et de l’économie sociale et solidaire : partager l’étude des rapports officiels, des ouvrages et publications qui abordent ce continent immatériel dont nous avons à découvrir ensemble la géologie, la géographie, les dangers comme les véritables espoirs qu’il recèle.
Une contribution de l’éthique ne réside-t-elle pas dans cette plongée aux sources des théories de la mesure, de nos appareils de description, de nos systèmes comptables et juridiques ?
Ne faudrait-il pas, sous l’égide de la sincérité, de l’expérience et de la rectitude, chercher ensemble les espaces du mieux, argumenter et tenir compte des points de vue hétérodoxes constructifs ?
Ainsi, pourrait-on promouvoir une pratique de l’information qui vaudrait d’abord par la qualité des liens dont elle est la clé, le symbole ou la condition, selon les situations humaines avec lesquelles elle entre en résonance.
Santé et numérique… Je termine par quelques mots sur l’intelligence augmentée (IA).
Le langage médical est un trésor de l’Humanité et doit être respecté à cette hauteur.
Prendre en compte les travaux d’Edwards DEMING sur les coûts de non-qualité, gaspillages et défaillances systémiques – de 20 à 40% des ressources en santé, selon l’OMS, en 2010 – s’impose.
En France, nous avons manqué des rendez-vous. Ceux de systèmes d’information hospitaliers vivants, d’un système médico-tarifaire intégrant toutes les modalités de l’offre de soins et des parcours, des normes d’interopérabilité, du dossier médical et soignant personnel et partagé dont l’échec coûteux entrave toute médecine de réseau, de relations plus ouvertes et intelligentes avec les industriels de l’information. Nous devons certainement encourager les jeunes à le tisser, à le nourrir.
Des milliards gaspillés, de nombreux dégâts humains, des énergies et des compétences démotivées. Il sera difficile de rompre avec ces modèles du retard et de l’échec. Les blessures demeurent vives et nous doutons qu’un enthousiasme largement partagé soit au rendez-vous.
Par contraste, les succès chinois en IA ne sont-ils pas fondés sur la super-application WeChat, des travaux avec les commerçants et les mères de famille, les bicyclettes intelligentes en libre-service – le plus vaste réseau mondial d’objets connectés –, des entrepreneurs acharnés au travail et à la concurrence, et se rappelant les famines du XXe siècle ? Je vous livre cette citation de Kai-Fu LEE : « De nos jours, le savoir médical – qui sous-entend l’aptitude à poser des diagnostics exacts – est loin d’être équitablement partagé. Il est majoritairement détenu par un petit nombre d’individus certes très talentueux, mais qui, parce qu’ils sont humains, ont une mémoire imparfaite et un temps limité pour assimiler les dernières découvertes. » [3] RXThinking balaye plus de 400 millions de dossiers médicaux et les récentes publications spécialisées, et propose aux médecins chinois des recommandations.
Dans une économie dominée par l’IA, les mécanismes classiques des marchés ne sont plus opérants. La main-d’œuvre à bas coût ne confère aucun avantage face aux machines, et les monopoles fondés sur les données se perpétuent.
Il demeure que l’IA constitue un défi considérable pour l’humanisme réel, à distinguer de celui des prétoires ou du revenu universel de base destiné à calmer celles et ceux qui seraient devenus des « inutiles » Telle était l’une des grandes préoccupations de Stephen HAWKING (1942-2018).
En clair, organisons-nous afin de promouvoir la voie qui s’appuierait sur l’IA pour renforcer notre humanité, tout en restant attentifs aux usages adverses.
Peut-être est-ce en partie cela l’humanisme et le mutualisme solidaire, au XXIe siècle.
[1] Alvin et Heidi Toffler sont sans doute les futurologues les plus célèbres de notre temps. Le Choc du futur, la Troisième Vague, les Nouveaux Pouvoirs, publiés dans plus de cinquante pays et trente langues différentes, (d’après site internet éditions Fayard )
[2] LOUVOIS, logiciel unique à vocation interarmées de la solde, ANTS, Agence nationale des titres sécurisés, APB, Admission Post-Bac, SIRHEN, Système d’information des ressources humaines de l’Education nationale, ONP, Opérateur national de paie des fonctionnaires, GENESIS, gestion des détenus…
[3] Kai-Fu LEE, I.A. La plus grande mutation de l’histoire. Comment la Chine devient le leader de l’intelligence artificielle et pourquoi nos vies vont changer, Les Arènes, 2019, pp. 183-185..