Actualité de la Mésopotamie : quand le talent de la conteuse se conjugue avec l’expertise de l’assyriologue…
Evoquer des civilisations qui se sont développées entre le 3ème millénaire avant JC et le 1er millénaire après Jésus-Christ lors d’un petit déjeuner de Galilée.sp semblait relever de la gageure…. Ce qui est sûr, c’est que le « défi » a été relevé de main de maître !
Ce mercredi 21 février, près de 30 adhérents et amis de Galilée.sp sont venus écouter l’intervention de Véronique Grandpierre qui avait choisi de traiter le thème suivant :
Quelles continuités entre la Mésopotamie antique et le monde contemporain ?
Qui est Véronique Grandpierre ?
Gilbert Deleuil, Président du Conseil d’administration de Galilée.sp, a introduit cette matinée mésopotamienne en rappelant les éléments marquants du « parcours » de Véronique Grandpierre. Actuellement inspectrice d’académie (Créteil) et référente académique laïcité, Véronique Grandpierre est agrégée d’histoire, et docteur en assyriologie.
Elle a enseigné à l’université de Paris-8 Saint-Denis et à Versailles-Saint-Quentin. Elle est actuellement membre du laboratoire Identité Culture et Territoires (ICT) à l’Université de Paris-7 Diderot.
Elle est également membre du groupe d’intérêt scientifique sur le Moyen-Orient et les mondes musulmans. Elle est membre du conseil scientifique de l’Institut d’études de l’Islam et des sociétés du monde musulman, expert auprès de l’International Council of Monuments and Sites (ICOMOS) qui instruit les dossiers d’inscription au patrimoine mondial de l’UNESCO.
Elle est l’auteur de plusieurs ouvrages dont un livre sur la Syrie et un autre sur l’histoire de la Mésopotamie .
Les enjeux culturels d’hier et d’aujourd’hui en Mésopotamie
Au cours de ces derniers mois ou dernières années, des sites tels que Hatra, Ninive, Nimrud, des musées comme le musée de Mossoul, ou tout récemment Palmyre, ont fait la une de l’actualité Les destructions partielles ou totales de ces sites les ont rendus célèbres. Tous ces sites ont la particularité de se trouver en Mésopotamie
« Mésopotamie » est un terme grec qui signifie entre deux fleuves et qui, sur le plan historique, couvre une civilisation qui va du 3ème millénaire avant Jésus-Christ au premier millénaire après Jésus-Christ, donc un temps très long.
Plusieurs peuples se sont succédé et les Mésopotamiens n’ont jamais existé en tant que peuple. On rencontrera des perses, des grecs, des Romains. La Mésopotamie n’est pas un pays ce n’est pas une nation ; c’est la présence de plusieurs peuples sur plusieurs millénaires.
Ces peuples n’ont pas la même origine : Il y a des Sumériens dont on ne sait pas d’où ils viennent, des sémitiques comme les Babyloniens et les Assyriens, des Indo-Européens comme les Hittites. Tout ça se mélange Si on ne peut pas parler de mésopotamiens, en revanche on a bien une culture mésopotamienne qui est identique pour tous ces peuples d’origine différente ; une culture basée sur une écriture et sur deux langues : le sumérien et le babylonien dès le 4e millénaire avant Jésus-Christ avec des extensions qui sont très grandes puisque tout cela se passe sur plusieurs millénaires. On trouve à la fois des petites cités-états mais aussi des empires. Le plus grand est l’empire assyrien repris par l’empire babylonien.
Cet empire assyrien s’étend de l’Égypte côté ouest, à la mer Noire côté est et de la Méditerranée au Golfe arabo-persique, ce qui représente une étendue très importante. Tout cela va être repris par les néo-babyloniens et les Perses puis par Alexandre le Grand.
Le cœur de la Mésopotamie est axé sur la Syrie et l’Irak, avec des différences géographiques entre ces deux pays : En Syrie, la mer, un peu de montagne, un couloir, en partant de la Turquie, puis Alep, Damas et la descente vers la Jordanie. Sur la perpendiculaire, on a la trouée d’Homs, avec le Krach des chevaliers qui surplombe Palmyre, et on va vers l’Irak. En Syrie les villes se sont toujours mises au même endroit parce que ce sont des points stratégiques.
Par exemple la citadelle d’Alep se trouve au centre de la ville et c’est là qu’on a trouvé des restes du 4e millénaire. Cette citadelle est devenue ensuite hellénistique, médiévale, et elle se trouve toujours au centre de la ville.
En Irak c’est un peu différent puisqu’on a les deux fleuves, le Tigre et l’Euphrate, qui sont dans une plaine et qui sont des fleuves chargés d’alluvions. À chaque crue, on a noté que les fleuves ne revenaient pas dans leur lit d’origine, si bien que les villes anciennes, notamment dans la partie sud, ne sont pas dans la ville nouvelle même si elles sont près de la ville nouvelle. Dans le nord du pays, c’est le cas de Ninive qui est à côté de Mossoul, et dans le sud, c’est encore un peu différent puisque les villes anciennes sont au milieu du désert.
Chaque fois qu’il y a une guerre, c’est toujours pour les mêmes raisons, à savoir l’accès à l’eau ainsi qu’aux hydrocarbures et également pour les passages clés. Et cela dès le troisième millénaire puisqu’on a des témoignages sur ces points cruciaux. Par exemple Palmyre en ce qui concerne les hydrocarbures.
On n’avait pas perdu toute trace de cette civilisation mésopotamienne et la Bible a été l’un des outils de la transmission de la tradition avec l’image de Sardanapale, de Nabuchodonosor, de Babylone, de Ninive, donc une tradition issue de l’Ancien Testament puis la tradition chrétienne, les mages, l’astrologie. Le problème de la Bible c’est que son objectif est de transmettre l’histoire d’un peuple, à savoir le peuple hébreu qui a été en butte à ces souverains mésopotamiens. L’image que la Bible véhicule sur les gens de la Mésopotamie n’est pas positive car ce qui est mis en exergue c’est la démesure, la luxure, le vice. Puis a suivi la tradition grecque, qu’il faut prendre avec précaution puisque les Grecs se considèrent comme les meilleurs par rapport aux perses qui eux, sont très lascifs au milieu de leurs femmes ; ces mêmes femmes qui parfois gouvernent, telle la belle Sémiramis…
En même temps ils ont des jardins magnifiques, des constructions extraordinaires et on a gardé le souvenir de personnages comme Nabuchodonosor ou Sémiramis, des lieux idylliques comme les Jardins de Babylone, qui renvoient au jardin d’Eden, au Paradis, sans oublier la tour de Babel, symbole de l’orgueil humain et de la diffusion des différentes langues. Pour le reste, le souvenir s’est un peu estompé. Mais pourquoi s’estompe-t-il ? Plusieurs raisons à cela :
- d’abord parce que l’empire romain ne s’implante pas puisque la limite de l’Empire romain s’arrête à Palmyre. Les Occidentaux s’intéressent à Palmyre mais pas au-delà, et quand on pense à la partie orientale de l’Empire romain, on pense plutôt à l’Égypte. Après, pour ce qui concerne l’Egypte, il faudra attendre Napoléon…
- deuxième raison : le développement du christianisme. Le christianisme est une religion orientale. Pour les chrétiens, Babylone va symboliser l’empereur romain païen, symbole de l’oppression politique, avec, en arrière-plan, les figures du pécheur et de la prostituée…
Babylone perd cette notion d’oppression à partir du moment où l’empereur romain devient lui-même chrétien et à partir de ce moment-là on va plutôt se concentrer sur une Babylone symbole du vice et de la luxure, avec une réputation diabolique.
Renaissance et Humanisme…
Puis on ne va plus s’intéresser à l’Orient jusqu’au moment de la Renaissance. Et le premier pays à s’y intéresser, c’est justement la France. La France de François 1er. On redécouvre les textes grecs et avec eux aussi l’Orient. Mais c’est surtout pour une question politique que la France s’intéresse à cette partie du monde puisqu’à l’époque, il va y avoir une alliance entre François 1er, roi très chrétien du royaume de France et Soliman le Magnifique, Padishah de l’islam, dirigeant de l’Empire ottoman. Pourquoi cette alliance ? Soliman le magnifique règne sur l’Europe à partir des Balkans, et ça va jusqu’au Maghreb (sauf le Maroc). Il a la maîtrise de la Méditerranée. Alors pourquoi une alliance avec François 1er, roi d’un tout petit territoire, d’autant que les deux souverains sont de religion différentes ? Tout simplement parce que les deux souverains ont un ennemi commun : les Habsbourg, et plus particulièrement Charles Quint qui veut avoir la maîtrise de la Méditerranée et du Maghreb auxquels il faut ajouter la domination qu’il exerce déjà sur la Picardie et la Bourgogne. L’alliance se passe juste après Pavie. Il s’agit de bloquer les Habsbourg. Cette fois, la religion n’intervient pas dans l’alliance et c’est la politique qui joue le rôle le plus important. Du même coup, en se rendant sur place, les français s’intéressent à ces différents sites ; ils observent, ils rapportent des objets en France. Par ailleurs, Soliman-le-magnifique est connu pour être un très grand mécène, un connaisseur des arts mais seulement des arts islamiques et pas ce qui concerne les périodes antérieures. Pour les périodes antérieures, les Français ont en quelque sorte « carte blanche ».
Les Lumières et l’Orient…
Le deuxième moment c’est celui des lumières – le 18ème siècle -, puis le 19ème siècle. C’est le moment où certaines disciplines vont se développer : la philologie, l’ethnologie et la géographie. C’est aussi à ce moment-là qu’un deuxième pays entre en scène en se passionnant pour cette partie du monde : la Grande-Bretagne, et plus généralement les pays anglo-saxons. Pourquoi les Anglais s’intéressent-ils à ces territoires ? Parce qu’ils commencent à aller en Orient en suivant la route des Indes qu’ils sont en train de maîtriser. A nouveau, prévalence de la raison politique et économique, ce qui va de fait entraîner l’intérêt pour ces civilisations et cet Orient. Par contre, l’intérêt culturel n’est toujours pas à l’ordre du jour.
Des découvertes bouleversantes… (I)
Ces pays anglo-saxons sont protestants et ils veulent vérifier matériellement ce que disent les textes bibliques. Parallèlement en France, l’intérêt pour l’Orient n’a pas diminué, au contraire. En France, c’est Montesquieu avec les Lettres persanes, Voltaire et Sémiramis ; au point de vue musique c’est Jean-Philippe Rameau avec les Indes galantes et un livre qui va être traduit en français et qui a va avoir un véritable succès : les Mille et une nuits avec le personnage de Shéhérazade qui fait rêver… La traduction se fait dans le courant du 17ème siècle mais la diffusion intervient vraiment au 18ème siècle. Il ne faut pas oublier qu’à l’époque la langue diplomatique est la langue française et cette diffusion se fait dans toute l’Europe. Il y a alors un intérêt croissant pour l’Orient. On va rapporter des bas-reliefs, on va découper en prenant soin d’enlever tout le superflu, à savoir des espèces de « pattes de mouches » sans se rendre compte alors qu’il s’agissait d’une écriture. Il faut attendre le 19ème siècle pour se rendre compte que ces espèces de coins présents sur les sculptures ont une signification. Il s’agit de différentes écritures, toujours en forme de coins, d’où le nom d’écriture cunéiforme.
C’est en 1857 qu’on arrive à traduire pour la première fois le babylonien. Et on va essayer de voir alors si tout le monde est bien d’accord sur la traduction.
On va prendre pour cela 4 savants dans 3 pays différents : Jules Oppert en France, Henry Creswicke Rawlinson et William Henry Fox Talbot en Angleterre, Edward Hincks en Irlande, . Pour la première fois, on va utiliser la photo et on va envoyer les tirages sous enveloppe scellée à chacun des savants. On va leur demander de faire une traduction et de rendre leur traduction séparément. Puis on va décacheter l’enveloppe et la traduction devant tout le monde. On se rend compte alors que les 4 savants aboutissent pratiquement à la même traduction. On considère que le babylonien est déchiffré.
L’intérêt pour ces civilisations millénaires ne faiblit pas et un nouveau pays arrive qui va vouloir se mettre en avant parce qu’il n’a jamais pu le faire jusqu’à présent faute d’une organisation suffisante. Sans empire colonial, l’Allemagne va vouloir se distinguer des autres pays européens d’une façon particulière. L’Allemagne va s’implanter en Orient avec une stratégie bien à elle : un train/une gare, une école, un chantier de fouilles. Ainsi, tout le long du « Bagdad Bahn », on aura à chaque station un train, une école, un chantier de fouilles.
Pour le coup, c’est à ce moment-là que la culture fait son entrée et devient importante. Désormais, 3 cultures européennes différentes sont présentes sur le terrain avec des politiques économique, politique, culturelle totalement différentes.
C’est aussi à ce moment qu’on va se rendre compte qu’il n’y a pas que le babylonien qui s’écrit en cunéiforme. Visiblement, il y a une autre langue ou une autre écriture. Les controverses et la concurrence vont s’exacerber entre les pays, notamment entre la France et la Grande-Bretagne, entre le Louvre et le British Museum. C’est à qui fera les plus belles expositions. Plus tard le musée de Berlin entrera dans la « course », mais il traîne un petit peu.
C’est entre les deux guerres, dans les années 20, que l’on découvre une autre langue antérieure au babylonien. On va commencer à le déchiffrer et à découvrir qu’il existe plusieurs formes d’écritures cunéiformes :
- pour le sumérien on écrit en idéogrammes
- pour le babylonien, on mélange les idéogrammes sumériens mais avec des phonogrammes c’est-à-dire avec des signes qui renvoient à des sons. Un signe pouvant renvoyer à plusieurs sons différents et les Babyloniens les mélangent.
L’alphabet cunéiforme d’Ougarit qui apparaît au 14e siècle avant Jésus-Christ, c’est Alpoum, Bitoum, Gamaloum, c’est-à-dire, le bœuf, la maison et l’arme courbe, en fait le bâton de berger, autrement dit Alpha, Beta, Gamma, via les Phéniciens.
On a donc plusieurs écritures avec plusieurs langues d’origines différentes : l’ougaritique et un alphabet cunéiforme, qui est sémitique. Le perse est un alphabet cunéiforme, mais c’est une langue indo-européenne. Le babylonien est composé de phonogrammes et d’idéogrammes et c’est une langue sémitique. Le sumérien est composé d’idéogrammes et c’est une langue dont on ne connaît pas l’origine ; elle est agglutinante avec des racines et des suffixes et des infixes comme le chinois, le coréen, le malgache ou le hongrois.
Et sur 4 millénaires, il y a encore des tas de langues qu’on connait mal, qu’on ne connaît pas et qui restent à découvrir et à déchiffrer.
À partir de ces découvertes, qu’a-t-on pu apprendre en plus sur ces civilisations ? D’abord, en ce qui concerne la religion. Ces Mésopotamiens sont des polythéistes. Certes. Mais en Europe, les chercheurs vont être confrontés à des faits qui vont remettre en cause certaines bases pourtant bien établies par le Livre « Premier »…
Un soir de 1872…
… Un certain George Smith travaille dans les sous-sols du British Museum à faire des joints, C’est-à-dire à recoller des morceaux de tablettes qui ont appartenu à la bibliothèque du roi assyrien Assurbanipal c’est-à-dire des tablettes du 7ème siècle avant Jésus-Christ.
Il y découvre l’histoire d’un bateau qui vogue sur les flots et qui s’échoue sur une montagne et le tout à l’issue d’un déluge. Et voici ce qu’il traduit : « Un 1er jour, un 2ème jour, le mont nitsir ne laissa plus bouger. Un 3ème jour, un 4ème jour, le mont nitsir ne laissa plus bouger. un 5ème jour, un 6ème jour, le mont nitsir ne laissa plus bouger. Quand arriva le 7ème jour, je fis sortir une colombe et je la lâchai. La Colombe partit et revint. Aucun emplacement ne lui étant apparu, elle avait fait demi-tour. Je fis sortir une hirondelle et je la lâchai. L’hirondelle partit et revint. Aucun emplacement ne lui étant apparu, elle avait fait demi-tour. Je fis sortir un corbeau et je le lâchai. Le corbeau partit et vit le reflux des eaux. Il mangea, gratta et leva la queue et ne fit pas demi-tour. Je fis sortir aux quatre vents et je fis un sacrifice ».
En lisant ceci, George Smith fait bien sûr la relation avec la genèse : « Les Eaux baissèrent au bout de 140 jours et au 7ème mois, au 17ème jour de ce mois, l’arche s’arrêta sur le mont Ararat. Au bout de 40 jours, Noé ouvrit la fenêtre. Il lâcha un corbeau qui alla, revint en attendant que les eaux aient séché sur la terre. II lâcha une colombe pour voir si les eaux avaient diminué à la surface du sol. La colombe ne trouvant pas d’endroit où poser ses pattes revint vers lui dans l’arche. Il attendit encore sept autres jours et lâcha à nouveau la colombe hors de l’Arche. La colombe revint vers lui et voici qu’elle avait dans le bec un rameau d’olivier. Il attendit encore sept autres jours et lâcha la colombe qui ne revint plus vers lui ».
Et là, l’impact est immédiat. Cette découverte fait la première page des journaux anglais, sachant que cette façon de faire se perpétue jusqu’à maintenant dans ce pays. Quand il y a des trouvailles au Moyen-Orient, cela fait la une de la presse écrite ou des journaux télévisés alors qu’en France, lorsqu’on trouve quelque chose, personne ne le sait.
Des découvertes « bouleversantes » (II) !
Cette découverte est bouleversante, voire terrible, car cela veut dire qu’un texte plus ancien a inspiré la Bible. La Bible n’est pas le texte originel. Tout cela est très embêtant car la grande question à l’époque est de savoir en quelle langue parlait Adam, le premier homme. Il ne parlait pas araméen ou hébreu, mais… babylonien ! Horrible découverte ! Et le pire c’est que les mêmes éléments se retrouvent en sumérien. Là il ne s’agit plus de sémites et en plus, c’est plus ancien. L’intérêt va être fulgurant. Ajoutons qu’il y a une ressemblance impressionnante avec la construction de l’Arche et que d’autres textes font référence à un homme formé d’argile et que pour le créer, on a dû sacrifier un dieu, notamment en mangeant sa chair et en versant son sang…
On va trouver trace de symboles religieux : le croissant de lune, l’arbre de vie, et des questions qui se sont posées dès le 3ème millénaire avant Jésus-Christ : un homme peut-il représenter un dieu ? Et s’il peut représenter un dieu, comment un homme peut-il savoir comment représenter un dieu (religion polythéiste) ? D’autant qu’un homme ne peut pas regarder un dieu parce qu’un dieu est entouré d’un « melam » – une aura – terrifiante et effrayante qui va réduire en cendres celui qui va le regarder, ce qui n’est pas sans rappeler l’épisode du buisson ardent de la Bible. Alors comment faire ? Se pose alors la question de la représentation ou de la non représentation des dieux : sous forme d’animaux ? Sous forme de symbole(s) ?
On est au tournant du 20ème siècle, au moment où le sumérien est encore balbutiant quant à sa compréhension, et la question est toujours là. En France, on est en pleine affaire Dreyfus, d’où l’importance de savoir si la Bible est bien le premier livre, si ce sont des sémites ou pas des sémites, c’est extrêmement important pour des raisons politiques autres que l’histoire de la Mésopotamie.
Et pendant ce temps…
Un allemand, Friedrich Delitzsch, a continué à chercher. Il va faire toute une série de conférences sur le thème « Babel und Bibel » et qui va démontrer effectivement tout l’héritage babylonien de la Bible.
Friedrich Delitzsch est luthérien et quelques années plus tard, à la fin de ses conférences, il va appeler à retirer l’Ancien Testament des textes canoniques chrétiens. La coupure se fait entre l’Ancien Testament et le nouveau mais pas entre la genèse et les polythéistes. Delitzsch n’est pas antisémite. Mais sa recherche qui conduit à enlever l’Ancien Testament de la Bible chrétienne va être reprise par certains de ses disciples. On est entre les deux guerres et certains interviennent dans l’entourage d’Hitler. C’est à ce moment que certains émettent l’hypothèse que les Sumériens seraient des Aryens. C’est les Sumériens qui ont tout inventé : récupération politique.
L’héritage politique de la Mésopotamie
On a parlé de l’héritage religieux, mais il existe aussi un héritage politique. De nos jours, on ne l’a plus vraiment, mais on l’a eu pendant un certain temps, notamment dans la conception de la royauté. Pour les Mésopotamiens on a d’abord, par les dieux, le choix d’un Etat, concrétisé par sa ville principale. Ensuite on fait descendre dans cette ville principale la royauté qui descend du ciel. Cette royauté, pour l’exercer, les dieux vont choisir un roi. Dans les mythes mésopotamiens, on a les sédentaires qui sont représentés par la ville, et on a la belle déesse de l’amour, la déesse Ishtar, ou la déesse Inanna (chez les sumériens) qui va choisir un pasteur pour faire l’alliance entre les sédentaires et les nomades, entre les agriculteurs d’un côté et les bergers de l’autre. Et à partir de ce moment-là le roi a toujours le titre de pasteur des peuples. Pasteur des peuples parce qu’il a toujours plusieurs peuples sous sa coupe. Il est le gardien du troupeau. Le roi va faire le lien entre le ciel et la terre, entre les dieux et les hommes. Lui aussi va avoir un « melam » qui lui est conféré par les dieux puisqu’ils l’ont choisi. Il s’agit donc d’un roi de droit divin.
La tour à étages – la ziggourat – fera le lien entre le ciel et la terre, de même que l’arbre – et le roi est représenté par l’arbre aussi – Gilgamesh s’écrit parfois guishgamesh, c’est-à-dire l’arbre. On représente le roi de façon symétrique par rapport à l’arbre de vie.
Les dieux peuvent choisir une autre ville sans que le roi ait fait quoi que ce soit, ce qui explique les changements d’hégémonie et les changements d’Etat.
C’est la royauté qui descend du ciel, après on choisit un roi le roi est mortel, la royauté ne l’est pas. Le roi va transmettre ce qu’il a appris ; mais la royauté elle est fixe. Elle peut changer de ville parce qu’elle le décide parce que les dieux décident de la lui faire changer mais ce n’est pas une décision du roi. C’est ce qu’on retrouve dans la conception française de la royauté : « le roi est mort vive le roi », la royauté avec les deux corps du roi, La royauté ne meurt pas, c’est le roi qui meurt. Le roi est un homme, la royauté est une institution divine qui ne peut pas être remise en cause.
La justice
Ce roi dirige les gens, mais c’est un roi qui est là aussi pour défendre contre l’envahisseur, et puis défendre c’est-à-dire rendre la justice à l’intérieur de son territoire. On a donc un roi de guerre et un roi de justice. Le roi est justicier.
C’est là aussi que réside la grande différence entre la conception hébraïque et la conception mésopotamienne en matière de justice : c’est que la justice chez les Mésopotamiens est humaine, elle n’est pas divine. Elle est humaine parce qu’elle ne règle que les conflits des humains. Si c’était une justice divine, elle pourrait être appliquée à des dieux puisque la justice divine est comme un dieu et qu’elle est cent mille fois démultipliée. Une justice divine appliquée aux humains, les réduit à néant. La justice ne peut-être qu’humaine et un roi doit être juste et mesuré. Raison pour laquelle ce ne peut être qu’un humain qui rende la justice. Il va rendre cette justice sous un dais (qui rappelle l’arbre) et sur un podium, symbole des racines, en prenant sous son manteau la veuve et l’orphelin, c’est-à-dire ceux qui ne peuvent pas se défendre. Tout cela est rappelé dans tous les prologues des codes de lois, qui sont en fait des codes de jurisprudence et ce, dès le 3ème millénaire avant Jésus-Christ. Le code d’Ur-Nammou commence ainsi : « je ne livrais pas l’orphelin au riche ; je ne livrais pas la veuve au puissant ; je ne livrais pas celui qui n’a qu’un sicle (un sou) à celui qui a une mine (un million) ; je ne livrais pas celui qui n’a qu’un mouton à celui qui a un bœuf. Mes gouverneurs, ma sœur, mes frères, je ne me tins nullement prêt à accéder à leurs désirs. Pas de passe-droit. Je n’imposerai pas de travail. Je fis disparaître la méchanceté et la malveillance et les plaintes et j’établis la justice en ce pays ».
Il s’agit d’un code de jurisprudence puisqu’on agit par analogie, mais qui ne se présente pas comme les codes de lois actuels qui répertorient par type d’infraction. En Mésopotamie, on ne répertorie pas par type d’infraction mais par statut des personnes, de la victime : s’agit-il d’une femme mariée, une jeune fille libre, un(e) esclave ? En fonction du statut de la victime, les choses sont différentes ; le but est d’indemniser au mieux la personne qui a subi le préjudice, sachant que la personne qui a subi le préjudice n’est pas forcément la victime. Explication : on tue un esclave, la victime c’est l’esclave, mais le préjudice est pour le propriétaire. On viole une fille, la victime c’est la fille, mais le préjudice est pour le père. Le but est de rembourser la personne lésée. Cela nous semble aberrant, mais n’oublions pas que dans le droit musulman, ça existe encore et que ça explique les crimes d’honneur. On rembourse selon le principe du “talis talis”, autrement dit, la loi du talion, que l’on retrouve dans le droit hébraïque.
Les sciences
Les mésopotamiens nous ont légué beaucoup de choses dans le domaine des sciences. En Mésopotamie antique, la divination est la plus grande des sciences. Il y a des écoles qui se mettent en place à partir du 3ème millénaire avant Jésus-Christ. A cette époque, un grand nombre de personnes dans les populations sait écrire et lire. Il y a également ceux qui se destinent à être scribes avec un cursus plus poussé que les autres, jusqu”au grand savant. Pour pouvoir étudier, ils vont avoir des bibliothèques. Et cette bibliothèque à des accès réservés. Et sur certaines tablettes, on a également des accès réservés. Et pas question de communiquer des ouvrages à des étrangers. D’autres tablettes se terminent par des mentions du type “Que l’initié le montre à l’initié, Le non initié ne doit pas le voir ». Pour autant, les tablettes n’ont pas pour but essentiel de transmettre le savoir. La tablette ne permet pas d’apprendre véritablement quelque chose car la tablette est avant tout pensée comme un aide-mémoire. Le vrai savoir se transmet uniquement par voie orale. On va avoir des tablettes du style « tablette d’exorcisme » avec les incantations qu’il conviendra de faire avec juste le début de l’incantation, mais pas toute l’incantation puisque celui qui doit la faire la connaît. On trouve également sur cette tablette des recettes de parfums ou de cuisine.
Grâce aux tablettes, on peut déchiffrer jusqu’à un certain point. Du fait de cette tradition purement orale, beaucoup de choses nous échappent.
Le cursus de base, lui, est connu : des exercices qui se présentent toujours de la même façon (grilles d’exemples) pour agir ensuite par analogie. On trouvera également des listes de mots à copier. Cela permet de découvrir que certains mots dans notre langue viennent de ces civilisations mésopotamiennes (Sumer, Babylone). Quelques exemples : le mot safran, le mot curcuma, le mot gypse, mais aussi des choses plus concrètes ; par exemple, nous sommes-nous jamais demandé pourquoi nous étions orientés au nord ? Peut-être parce que les premières cartes étaient orientées à l’est et que du coup on regardait vers l’orient. Ce qui semble assez logique quand on sait que le soleil se lève à l’est plus logique et plus rationnel. En mathématique, on n’a pas d’énoncés théoriques ; mais on pourrait parler d’application pratique dans des exemples comme l’axiome d’Euclide et le théorème de Pythagore. On sait aussi que les Mésopotamiens ont réalisé la vis dite d’Archimède : on en trouve dans les jardins de Ninive.
L’héritage des mésopotamiens
Dans notre quotidien, nous utilisons en partie la façon de calculer des mésopotamiens qui ne calculaient pas en base 10 mais en base 60, comme nos heures et nos degrés ; même chose pour les jours de la semaine : 7 jours. Les plus hauts niveaux de connaissances se situent en matière de médecine, d’exorcisme et de divination.
Au 3ème millénaire avant Jésus-Christ, la divination se fait en mettant une goutte d’huile dans l’eau, l’eau censée être la connaissance. C’est l’élément qui soigne et on sait que toutes les potions sont à base d’eau et d’huile. Connaissance des plantes également qu’on fait macérer et tout cela vient de l’intérieur de la Terre. Plus précisément dans la mythologie mésopotamienne on a coupé un dieu en deux et le Tigre et l’Euphrate sortent des yeux de Tiamat, raison pour laquelle l’oeil pleure, mais l’œil qui signifie également la connaissance. Cela peut-être le mauvais œil ou le bon oeil. Le tout est lié à une parole qui est créatrice, ce que l’on retrouve dans la Bible : « Que la lumière soit et la lumière fut ». En plus de l’huile dans l’eau, on peut lire dans les entrailles de mouton et à partir du 1er millénaire avant Jésus-Christ, l’astrologie va permettre le développement de l’astronomie, et réciproquement. Les Mésopotamiens savaient prédire les éclipses lunaires, ils avaient repéré les 7 planètes. C’est ainsi qu’ils seront célèbres pour leurs Mages (« Magoum »). Au final, les Mésopotamiens nous ont légué beaucoup de choses mais le souvenir reste « vague ».
La guerre et les destructions de sites
Mais si on ne se souvenait pas de cet héritage, pourquoi détruire tant de sites au cours des guerres en Irak et actuellement en Syrie ? Les situations sont assez différentes pour chacun de ces deux pays. En Syrie, on a des vestiges d’à peu près toutes les époques contrairement à l’Irak. Ceci s’explique par le fait que la plupart des invasions médiévales et modernes se sont faites par l’Est. Elles ont d’abord dévasté l’Irak puis elles se sont un peu essoufflées en Syrie, et qui a eu pour effet de protéger le pays. Contrairement à l’Irak, la Syrie avait un patrimoine qui allait de la préhistoire jusqu’à nos jours, un patrimoine « en continu », avec des témoignages de toutes les époques. Deuxième raison : l’Empire romain s’est bloqué à Palmyre. Il y avait plus de choses en Syrie qu’en Irak.
En Syrie, la situation a été très calme jusqu’au printemps arabe de 2011. De son côté, Bachar al-Assad avait lancé dès 2007 un programme touristique en s’appuyant à la fois sur Alep, l’époque médiévale, le krach des chevaliers et les sites classiques : Palmyre, Apamée.
En Irak il n’y a pas de vestiges romains. Mais tout avait été bien enfoui sous terre jusqu’à la fin du 19ème siècle. Rien n’avait été dévasté à l’époque médiévale, il y a donc du contemporain et de l’antique mésopotamien. La situation était différente de celle de la Syrie du fait que Saddam Hussein voulait mettre en place un régime dit laïque. Du coup il s’était appuyé sur les vestiges Mésopotamiens pour se mettre lui-même en exergue et pour cela il s’était appuyé sur Babylone, au point de reconstruire en partie la ville puisque c’était son projet, en construisant son palais en surplomb et en se faisant représenter sur de grandes affiches avec une main sur Hammurabi et une main sur Saladin ou alors avec Nabuchodonosor derrière. Il s’appuyait donc sur Babylone mais pas sur Ninive donc pas sur les Assyriens. Il voulait même faire un barrage à Ninive pour noyer toutes les capitales assyriennes. Ceci parce qu’on est en territoire chiite et que le Kurdistan n’est pas loin… Puis la guerre est venue, avec le pillage du musée de Bagdad en 2003, ça a été un tournant décisif pour autre chose : la prise de conscience que les objets de ce musée avaient une grande valeur ; il s’agissait d’un patrimoine qui se vendait bien.
Au moment du printemps arabe et de l’insurrection en Syrie il va y avoir un impact sur le patrimoine. Avec l’insurrection en Syrie la réaction de Bachar al-Assad c’est : je dois protéger mes sites stratégiques. Les sites stratégiques ne sont évidemment pas les sites culturels. Il faut protéger la côte située en territoire alaouite, cette communauté dont est issu Bachar al-Assad, la trouée de Homs et l’axe Surki/Alep/Damas/Jordanie, avec les deux villes Alep et Damas qui sont très importantes pour le pays. Bachar al-Assad va concentrer ses troupes sur les points stratégiques en délaissant une partie de son territoire. Il pense pouvoir reprendre la main une fois que la confusion créée par l’insurrection aura été surmontée. Mais ce qu’il n’avait pas prévu, c’était l’arrivée de Daech. Daech qui semble surgi de nulle part, mais qui n’est pas surgi de nulle part et qui a eu 11 ans pour se préparer puisque c’est une organisation qui émane de l’Irak et de la guerre en Irak. Daech arrive avec une structure toute prête Et qui est particulièrement bien organisée. Daech s’implante dans les zones particulièrement désorganisées. Il s’implante sur les routes près des barrages et près des hydrocarbures. Pourquoi s’en sont-ils pris à Palmyre ? Non parce que c’est une ville antique mais parce qu’il y a des gisements de gaz dans la région. Et pour Raqqa, c’est la proximité du barrage qui les intéressait.
Et quand les lieux culturels appartenant au patrimoine sont également des lieux stratégiques, il est clair qu’en temps de guerre ils font largement les frais des hostilités. Il suffit de citer l’exemple d’Alep et de son minaret. Il faut ajouter à cela les pillages de sites archéologiques dès le début de la guerre Et le développement de marchés pour écouler les produits du pillage.
Daech et la culture : du passé, faisons table rase…
En détruisant, Daech rend homogène le territoire. On coupe les racines des gens qui vivent là, on les fait fuir et on détruit tous les vestiges de leur passé. Et détruire tout ce qui appartient au passé permet de construire quelque chose de neuf…
Ajoutons l’impact médiatique de telles actions : les destructions sont un bon moyen pour faire la UNE des journaux télévisés.
Tout est calculé. Daech n’agit pas par crétinisme mais de manière stratégique. ils ont étudié l’esclavage, le principe de décapitation, tout ce qui choque sur place et en Occident en mettant en place une scénographie, une iconographie. Ce qui donne encore plus de pouvoir à toutes ces destructions. Daech s’est livré à des autodafés et des bibliothèques universitaires ont été brûlées. C’est ainsi que des livres de médecine, de mathématiques, philosophie, littérature, histoire, ont été détruits. Ces matières ont été remplacées par des cours de religion.
Comment Daech justifie-t-il toutes ces destructions ? Par le fait que Mahomet lui-même a détruit toutes les idoles, par le fait que les sites archéologiques sont des sites occidentaux donc qu’ils portent la trace des colonisateurs. Leur thème, c’est l’orient qui se libère des effets du colonialisme occidental.
Quid de la coalition des pays occidentaux ? Et que dire de ceux qui ont rejoint Daech venant d’occident et qui représentent près du tiers des effectifs de Daech ? La rhétorique de Daech, c’est de dire qu’on n’a pas demandé leur avis aux Syriens, alors que c’est leur passé.
Pendant ce temps les pillages des sites archéologiques et des musées ont été multipliés à hauteur de 500 % (chiffrage émanant de la douane américaine).
Une guerre terminée ?
En sommes-nous arrivés aux enjeux de la reconstruction ? Elle devrait concerner en priorité les logements les routes les infrastructures les hôpitaux. C’est aussi le moment où on va reprocher à certains groupes industriels d’être restés sur place (exemple Lafarge).
Rester, ça veut dire être présent pour la reconstruction. En Irak, le ministre Le Drian a très vite proposé les services de la France en rappelant que nous étions aux côtés des Irakiens lors de la guerre. Nous n’avons pas participé au conflit et nous avons perdu non seulement des marchés, mais en termes d’archéologie nous avons été totalement évincés. En fait, tout est lié même si ça ne devrait pas l’être…
En Syrie La guerre est toujours là et le conflit s’est complexifié (Kurdes, turcs, etc…)
L’idée de reconstruction du patrimoine est présente en Syrie, pas en Irak.
Le point de départ de l’idée de reconstruction du patrimoine a été la destruction du minaret d’Alep. Va-t-on le reconstruire à l’identique ? Ceci est valable pour le minaret mais aussi pour le site de Palmyre.
Dans le même temps, des pays comme Oman et le Qatar revendiquent leur inscription au patrimoine mondial de l’humanité de l’UNESCO du fait de leurs racines mésopotamiennes.
A propos de services publics en Mésopotamie…
L’intervention de Véronique Grandpierre ne pouvait se terminer sans que soit évoqué le thème des services publics en Mésopotamie.
Les temples font fonction de services publics. Par exemple, le temple du dieu Nergal, le dieu des enfers, du monde des morts, c’est les croque-morts et le funérarium.
Le temple de Gula, c’est la déesse de la médecine, l’hôpital et les chiens à côté, qui lèchent les plaies.
Pour la monnaie, il y a le temple de shamash, le dieu de la justice, qui fait aussi office de prêt, à des taux nettement plus avantageux qu’entre particuliers (jusqu’à 500 % !).
L’auditoire, captivé par cet exposé lumineux et passionnant, aurait bien « joué les prolongations »…. Mais il a fallu revenir aux réalités de nos quotidiens respectifs et mettre un terme à ce petit déjeuner, en remerciant Véronique Grandpierre qui a réussi à rendre la Mésopotamie si présente… et vivante !
Bas-relief du Palais d’Assurbanipal, roi de Ninive