… PRELEVEMENTS PUBLICS, MODELE SOCIAL FRANÇAIS,
DEMYSTIFIONS ENFIN LES VERITABLES ENJEUX !
La réforme des retraites est un véritable serpent de mer. La plupart des gouvernements se sont attaqués au problème, le plus souvent avec les pires difficultés et l’incompréhension générale tant le sujet est aussi confus, rendu ardu et passionnel …
Essayons d’y voir plus clair. Quels sont les véritables enjeux d’un point de vue citoyen ?
Une simple réforme technique, comptable ?
Cette réforme est le plus souvent présentée comme se résumant à celle des régimes des retraites, visant à établir l’équilibre des comptes à moyen ou long terme, c’est à dire l’équilibre entre les recettes provenant des cotisations sociales et les dépenses, c’est à dire le montant des indemnités de retraite versées.
En somme, elle est présentée comme une réforme comptable de bon sens, une simple question de rééquilibrage des recettes et des dépenses dans le temps.
Il est vrai que les paramètres évoluent structurellement de manière divergente entre les unes qui dépendent du PIB ainsi que des taux d’activité et de cotisation et les autres, qui dépendent d’un accord politique entre les partenaires sociaux et l’Etat sur l’âge de départ à la retraite, le nombre d’annuités de cotisations requises et le taux de remplacement du salaire d’activité. Afin de rééquilibrer les comptes, il est tentant de retarder l’âge de départ à la retraite, sinon de réduire le montant des retraites perçues. D’autant plus que la durée de vie n’a cessé d’augmenter.
Et, l’économie dans tout ça ?
Cela étant, ce raisonnement purement comptable peut être considéré comme biaisé car il ne prend pas en compte la question de l’évolution du PIB, c’est à dire de la croissance économique et du taux d’emploi de la population active. Les syndicats de salariés ont beau jeu de dénoncer l’incohérence d’un éventuel relèvement de l’âge de départ à la retraite, alors que les seniors sont au chômage dans une forte proportion (50%).
Du reste, les politiques économiques restrictives conduites en France depuis le traité de Maastricht de 1992 ont conduit à de longues périodes de désindustrialisation du pays et de sous-emploi. Cela n’a pas pu ne pas avoir de conséquences sur les cotisations sociales perçues et l’équilibre des comptes…
Le modèle Français de système des retraites …
Comme on le voit dans les statistiques de l’OCDE ci-après, la France se distingue des autres pays comparables par un âge de départ à la retraite précoce (environ 5 ans de moins), et donc une durée de retraite longue mais aussi par un taux de remplacement du salaire d’activité plus faible… Globalement, la part du nombre de retraités par rapport aux actifs / cotisants n’a cessé d’augmenter de manière critique.
Notons également que le produit des cotisations sociales de retraite dépend du montant annuel d’heures travaillées et que la France est, socialement, bien placée de ce point de vue (35 heures…).
Après tout, le modèle Français de système de retraite pourrait tout à fait se justifier pour des raisons historiques, sociales et correspondre à des choix de société qui nous sont propres et légitimes…
Oui, mais… Et, la question de l’avenir des services publics ?
Le taux actuel de prélèvement spécifique pour les retraites s’élève à 13 % du PIB contre 10,4 % pour l’Allemagne et 7 % pour la Suisse…
Malgré la faillite du modèle néo-libéral, les économies sont encore largement ouvertes et les pays qui connaissent des taux de prélèvement élevés gênent la compétitivité de leurs entreprises.
Le taux des prélèvements obligatoires Français (près de 47,5 % du PIB en 2020) est l’un des plus élevés du monde ! Il n’est guère concevable de l’augmenter davantage. Le consentement à l’impôt connait des limites !
Et, dans le même temps, la plupart de nos services publics essentiels sont dans « le rouge » en termes de moyens matériels et humains : Education nationale, Police, Justice, Armée, Diplomatie, Hôpitaux…
Faute d’une forte croissance économique, supposant la réindustrialisation du pays, le développement de sa compétitivité et donc un taux élevé d’emploi de la population active, la question de l’âge de départ à la retraite et du nombre d’annuités apparaît bien un sujet capital.
Et, si le véritable enjeu de la réforme des retraites n’était rien de moins que l’avenir de notre économie, et donc de notre modèle social, y compris l’avenir de nos services publics ?
Gilbert Deleuil
Préfet honoraire
Président du conseil d’administration
Galilée.sp
Les retraites en France et à l’étranger : 7 indicateurs clés
(source : OCDE)
Les populations de la France, de l’Europe et de l’OCDE vieillissent. Dans les années 50 en France, on dénombrait 5 actifs pour un retraité. En 2010, ce ratio est de 3.5. Il sera égal à 2 à partir de 2040.
Les régimes publics de retraite sont de plus en plus couteux. En France, les dépenses publiques consacrées à la retraite atteignent 13% du PIB en 2007. Elles seront de 14% en 2060. C’est au-dessus de la moyenne des pays de l’Union européenne.
Les Français partent à la retraite plus tôt que leurs voisins européens, en moyenne avant 60 ans.
En France, seul un peu plus d’un sénior sur deux travaille, c’est moins que la moyenne des pays européens.
Avec une sortie du marché du travail plus précoce et une espérance de vie plus élevée, les Français sont ceux qui passent le plus d’années à la retraite : 28 années pour les femmes, 24 années pour les hommes.
Les taux de remplacement des pensions en France sont légèrement en dessous de la moyenne des pays de l’OCDE et de l’Union européenne : 54% au salaire moyen, et 62% à la moitié du salaire moyen.
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En moyenne dans les pays de l’OCDE, un peu plus de 60% des revenus des personnes âgées proviennent de transferts publics. En France, c’est plus de 85%.