Pour ce dernier petit déjeuner avant la période des vacances d’été, Galilée.sp recevait Paul-Hubert des Mesnards, membre fondateur de l’association, ingénieur et pianiste. Gilbert Deleuil, Président du Conseil d’administration, a présenté l’intervenant du jour, « chantre » et praticien de la créativité.
On trouvera ci-après l’intégralité de l’intervention de Paul-Hubert des Mesnards qui avait choisi de traiter le thème suivant :
« Les fonctions publiques au cœur de l’innovation ?
Oui ! Et comment ! Mais … comment ? »
Bonjour et merci d’être là.
Permettez-moi de me présenter
Je me présente d’abord comme Ingénieur et pianiste
Ingénieur, oui, j’ai une formation d’ingénieur, ce qui veut dire que j’ai tous les attributs qu’on prête ordinairement à ce que l’on appelle couramment le « cerveau gauche » : la rigueur, le sens de l’analyse, le goût de la méthode, …
ET je suis aussi, et en même temps, expression maintenant consacrée,
Pianiste, ce n’est pas un hobby, c’est une activité à part entière, je donne des concerts, et je revendique ainsi les attributs du « cerveau droit », le côté artiste, la sensibilité, l’émotion, la fantaisie…
Rigueur ET fantaisie : je vis très bien avec les deux, au quotidien ; c’est l’un ET l’autre, pas l’un OU l’autre.
Or, le OU est un mal de notre époque, ce OU qui sépare, qui clive, qui impose des choix binaires
Mais dans notre monde complexe, incertain, nous avons besoin d’une pensée globale, celle qui est véhiculée entre autres par Edgar Morin, Michel Serres, … une pensée du ET qui relie. Je vous renvoie au dernier « billet d’humeur » du site de Galilée.sp : ET, c’est la pensée complexe, « une pensée qui relie en contextualisant » et « en se situant dans l’incertain ».
Je me définis aussi comme Consultant en créativité
J’ai exercé ce métier 40 ans, dont 30 dans le cabinet Créargie (c’est-à-dire créativité et synergie ou énergie), pionnier de l’introduction des méthodes de créativité en France, dont la devise est : « créateur de valeur ET d’enthousiasme » (toujours le ET), et 10 ans en indépendant
Pendant ces 40 ans, et même encore maintenant, j’ai aidé des organismes (entreprises, administrations, associations) à innover, à s’améliorer, à résoudre des problèmes, … avec une posture particulière et des méthodes.
La posture c’est celle d’un facilitateur, pas d’un expert qui fournit la solution clés en main ; non, le facilitateur dit : la solution, elle est en vous, je vous aide à la trouver, nous allons la co-construire ensemble.
Quant aux méthodes que j’ai pratiquées, elles sont nombreuses et portent des noms poétiques : Analyse de la Valeur, Design to cost, Design Value, Eco value design, Design Thinking, Réflexion Stratégique, Visioning, Problem solving, Management de projet, …
Mais elles ont toutes deux points communs.
Elles s’appuient sur la créativité, qui en est le fondement, le socle,
Et puis elles se pratiquent en collectif, en animation de groupes ou d’équipes
D’ailleurs Créargie a défini sa raison d’être ainsi : révéler la magie de l’intelligence collective
J’ai quelques réserves sur le mot intelligence, que je trouve un peu trop connoté QI, pensée, rationnel… L’intelligence est globale, elle implique tout l’individu : tête, cœur, corps et tripes et même âme.
Et au cours de ces 40 ans, je me suis forgé une conviction profonde : il y a un trésor caché, individuel comme collectif
Au niveau individuel : les gens valent mieux que ce qu’on croit, ce que l’on dit d’eux, ils ont un potentiel de créativité souvent ignoré y compris et surtout d’eux-mêmes.
Et au niveau collectif : il existe dans les organisations un trésor d’idées dans la tête des personnes, et ce trésor peut être révélé dans des conditions favorables : un climat facilitant, un défi à relever.
On l’a vu à l’œuvre pendant la crise du coranavirus, avec les industriels qui se sont mis à fabriquer des respirateurs en un temps record, des TGV devenus ambulances, et ce qui s’est passé dans les hôpitaux : dans un article récent du Monde, je lisais : « au moment du confinement les directions n’ont pas eu d’autre choix que de laisser faire les agents de terrain, car ça devait être très rapide. Si on avait procédé comme d’habitude, tout aurait pris six mois… » Et plus loin : « chez nous on a tout réorganisé en une semaine grâce aux agents de terrain. Pourquoi on n’utilise cette intelligence collective qu’en cas de catastrophe ? »
Alors révéler ce trésor ce fut ma mission, et maintenant que j’ai rejoint Galilée.sp, je l’exerce au sein de l’UPR CREATIVITE (UPR veut dire Unité de Partenariat et de Recherche, autrement dit c’est un service, une entité, un groupe de travail) car la devise de Galilée.sp, c’est bien « mettre les fonctions publiques au cœur de l’innovation ».
Alors je vais revenir d’abord sur le titre de ce petit déjeuner (pourquoi ce titre ?), puis je dirai quelques mots sur la créativité (rassurez-vous, ce ne sera pas un cours ! Il y a des formations pour ça) et enfin, avant d’ouvrir le débat, je vous parlerai de l’UPR créativité : à quoi elle sert, pour qui, comment, qu’est-ce qu’elle peut faire ?
Alors, le titre : les fonctions publiques au cœur de l’innovation, et comment ! mais…comment ?
Et comment !
On l’a bien vu pendant la crise, les services publics ont su faire face à la situation et innover
Et pour l’avenir ? Nous sommes submergés d’injonctions : il faut se réinventer (notre président – de la république, pas de Galilée.sp – l’a dit), il faut changer de logiciel, il faut un big bang (cela a été dit au dernier petit déjeuner), il faut innover, …. Mais tout de suite, et cela a été dit aussi au dernier petit déjeuner, on entend « oui, mais il y aura des résistances ».
Ah, la résistance au changement !
Ah, la résistance au changement ! Je voudrais en dire un mot. C’est la tarte à la crème du management et des consultants ! Pour moi c’est un leurre. On considère que c’est un mal à éliminer. Or la résistance au changement, c’est humain, c’est normal ! Les spécialistes du changement disent que c’est comme un processus de deuil, avec des étapes à franchir, et la résistance en est une. Et puis l’être humain naît avec deux séries d’instructions, pourrait-on dire : une tendance conservatrice et une tendance exploratrice. La coexistence de ces deux tendances (encore le ET) lui a permis à la fois de survivre et de se développer. Il a peur de l’inconnu ET soif de progrès, et tout se joue sur l’équilibre entre ces deux tendances.
Et comment le changement est-il présenté ? La plupart du temps il est imposé sous forme d’injonctions, venant « d’en haut », souvent sans explications, ou alors avec des justifications qui entraînent la peur (notre survie est en jeu) ou la culpabilité (si vous ne changez pas, ce sera pire). Et l’on s’étonne que ça résiste ! Alors on va forcer, et ça monte, ça monte jusqu’au conflit, avec les conséquences que l’on sait en termes de perte de temps, de coût financier comme social.
Au dernier petit déjeuner, Jean-Marie Fessler nous a appris que les participants au Ségur de la santé avaient reçu des tableaux à remplir, avec les rubriques déjà prédéfinies. Et quelques jours après ils étaient de nouveau dans la rue. Vraiment on s’y prend mal ! Demander aux gens de terrain de remplir des tableaux alors qu’au pic de la crise ils ont montré ce dont ils étaient capables. Il est temps de faire autrement !
Justement, et si l’on sollicitait l’autre tendance, la tendance exploratrice, celle de la créativité ?
Oui, mais comment ? Avec quelle méthode ?
Une bonne et une mauvaise nouvelle…
Là j’ai une bonne et une mauvaise nouvelle.
La bonne, c’est que les français aiment les méthodes ; ça vient de papa Descartes et de son discours.
La mauvaise, c’est que les français aiment tellement les méthodes qu’ils en font des procédures. Et la méthode qui devrait être un guide pour l’action devient un prescripteur rigide d’instructions à suivre, avec bien sûr des tableaux à remplir, des indicateurs, etc… Et en plus, comme les français aiment les modes (la mode est un des points forts chez nous), nous avons des modes managériales, et là, je vais forcer le trait, mais le public suit la mode du privé avec quelques années de retard, et comme le privé suit la mode américaine avec aussi quelques années de retard, on est mal barrés ! J’exagère, bien sûr !
Alors, revenons à la créativité : ce trésor, individuel comme collectif, comment le révéler ?
Je voudrais d’abord préciser le vocabulaire. Déjà le mot de créativité inspire des représentations fantasmatiques : le chaos, le délire, … Ça fait peur ! J’ai eu beaucoup de mal à introduire la créativité dans une grande école d’ingénieurs ; on me mettait en garde : « attention à ne pas détruire nos efforts pour inculquer de la rigueur à nos élèves ! ». Il y a 5 ans, le mot « créativité » avait dû être supprimé d’un rapport élaboré au sein d’un grand ministère. Et maintenant notre président de la République le prononce dans ses discours ! Et puis de quelle créativité s’agit-il ? Car il y a la créativité artistique, celle des loisirs créatifs, des lézards créatifs, la créativité en cuisine, celle des enfants à l’école, celle des génies (que nous sommes, bien sûr), etc… La créativité dont je parle est une créativité d’idées : c’est l’art de trouver des idées (et des bonnes, j’y reviendrai).
Créativité et innovation
Alors une définition plus précise : la créativité c’est l’art et la manière de générer en grand nombre et de façon fluide des idées variées, originales et pertinentes pour répondre à une problématique.
Mais on parle aussi d’innovation. Alors, créativité, innovation, y a-t-il une différence et laquelle ? Sans donner de définitions académiques, je dirais tout simplement que si la créativité, c’est l’art de trouver des idées, l’innovation, c’est l’art de les mettre en pratique. C’est pour cela que Galilée.sp a mis l’Innovation dans sa devise : il s’agit de mettre en place des solutions créatives pour répondre aux besoins des citoyens. Mais pour cela il faut des idées, donc de la créativité : la créativité, c’est le carburant de l’innovation.
Cette définition appelle des commentaires et des précisions.
L’art et la manière : j’associe deux dimensions, celle de la manière, qui renvoie à une notion de processus, et celle de l’art qui renvoie à la dimension humaine, avec sa part de subjectivité et même d’improvisation. La créativité est donc à la fois un processus organisé et une activité « artistique », au sens défini précédemment. C’est aussi à la fois une aptitude et une démarche.
Générer (…) des idées : le résultat, la « production » de la créativité ce sont des idées. Ce n’est pas encore une solution concrète, un objet, un produit, un service défini, mais c’en est la représentation mentale, la préfiguration. Mais une idée, c’est plus qu’un mot, c’est déjà un concept auquel il est possible de se raccrocher pour justement concevoir la solution, l’objet, le produit, le service.
En grand nombre : il ne s’agit pas de trouver L’IDEE géniale, mais d’ouvrir le champ au maximum. La créativité n’est pas la recherche obstinée de la meilleure idée (sur quels critères, d’ailleurs ?), mais le balayage le plus large de tous les possibles.
Des idées variées : la créativité ne se joue pas sur une seule dimension, elle utilise plusieurs angles d’attaque d’une problématique.
Des idées originales : la créativité est là pour apporter du nouveau, pour sortir du cadre dans lequel on se laisse souvent enfermer, on va le voir.
Des idées pertinentes : car le but de la créativité est toujours de répondre à une problématique. Il ne s’agit pas de générer des idées « en l’air », mais d’en proposer qui soient adaptées au contexte.
… pour répondre à une problématique : cela reste l’essentiel. La créativité n’est pas une démarche « gratuite », menée « pour voir ». Il y a toujours un enjeu. La problématique peut prendre plusieurs formes : ce peut être un défi, un problème à résoudre, une situation à améliorer, une situation nouvelle à laquelle il faut faire face, et ce dans tout domaine : produits, services, organisations, … Toute activité humaine est susceptible d’être un sujet de créativité.
Une dernière précision : la créativité peut être individuelle et collective. La créativité individuelle est d’abord une aptitude que l’on peut développer en s’entraînant. La créativité collective se mobilise à travers une activité de groupe ou d’équipe
Alors, tout le monde est créatif, du moins en a le potentiel, ça c’est ma conviction profonde, mais est-ce si facile de développer la créativité ?
Certainement pas, car il y des d’obstacles qui se présentent qui empêchent la créativité, aussi bien individuelle que collective, de se développer. Et, contrairement à une idée reçue, la plupart de ces freins ne viennent pas de l’environnement extérieur (les règlementations, le manque de moyens, les contraintes qu’on nous impose, voire « les chefs » ! …), mais sont en nous : nous nous fixons nous-mêmes nos limites à nos capacités créatives !
Parmi eux, il y en a deux qui sont les plus importants.
Le premier est ce que les spécialistes appellent « la fixation » ou « fixation fonctionnelle », et que j’appelle aussi « les autoroutes de la pensée ». Au fur et à mesure de ses expériences notre cerveau met en place des automatismes de pensée afin d’effectuer plus rapidement certaines opérations mentales. Très utile dans la vie quotidienne, ce mécanisme bloque la créativité.
Des exemples ?
Le problème des allumettes : 4 allumettes sont disposées en croix selon une certaine configuration géométrique. La consigne est de former un carré en bougeant seulement une allumette. Eh bien, on peut essayer de toutes les façons, ça apparaît vite impossible. Et pourtant, en bougeant une seule allumette on peut former le chiffre 4 qui est le carré de 2 ! En fait, en voyant la figure géométrique initiale, le cerveau s’est naturellement fixé sur le sens : « carré = figure géométrique » !
La flèche de Thorgal : connaissez-vous cette série de bandes dessinées ? Thorgal est un viking de l’époque médiévale, porteur de valeurs chevaleresques, qui vit des aventures initiatiques avec sa femme, la princesse Aaricia qui a été bannie de sa tribu. Dans une de leurs aventures, les trois vieillards du pays d’Aran, ils arrivent devant une ville inconnue et remarquent un portique auquel est accroché grâce à quatre liens un magnifique collier de pierres précieuses. Leur guide leur explique qu’une vieille légende affirme que celui qui arrivera à libérer ce collier de ses liens avec une seule flèche règnera sur le pays. Et Thorgal, dont l’adresse au tir à l’arc est proverbiale, se voit invité à tenter sa chance. « Couper ces quatre liens avec une seule flèche, c’est impossible », telle est sa réponse. Et Aaricia, elle, saisit la flèche, et coupe les quatre liens avec son bout tranchant ! Thorgal, expert en tir à l’arc, a été victime de la fixation fonctionnelle : pour lui, une flèche ne peut servir que tirée par un arc. Et c’est même pire, car il avait une solution à sa portée : tirer 4 fois avec la même flèche pour couper chaque lien séparément. Mais il avait interprété la consigne « … avec une seule flèche » dans un sens encore plus restrictif : « Tirer une seule fois ».
Un autre exemple historique, en fait un contre-exemple, c’est celui de Triboulet, le bouffon de François 1er. Il avait fait quelque chose de très grave, moquer les dames de la Cour, et c’était puni de mort. Mais comme le roi l’aimait bien, il lui a dit : « je te laisse choisir la façon dont tu mourras ». Imaginez-vous à la place de Triboulet, devant répondre immédiatement. Sûrement défilent dans votre cerveau tous les modes d’exécution pratiqués à l’époque : écartèlement, pendaison, décapitation, empoisonnement, injection léthale, électrocution, … euh, non, pas les deux derniers ! Eh bien Triboulet a simplement répondu : « Sire, je désire mourir de vieillesse », et le roi l‘a gracié et condamné seulement au bannissement ! Triboulet a échappé à la mort en échappant à la fixation qui fait interpréter « mourir » comme « être exécuté ». Ceci est très fort, car souvent nous interprétons les consignes qui nous sont données dans un sens plus restrictif. Et les mots sont des pièges : « mal nommer les choses, c’est ajouter au malheur du monde » (citation attribuée à Albert Camus).
La fixation joue même dans des actes simples du quotidien : un jour j’étais dans établissement dont les portes se verrouillaient et déverrouillaient par un système électronique avec un badge ; eh bien je n’ai pas pu m’empêcher, en approchant le badge de la porte, de faire avec la main un mouvement circulaire, comme avec une clé, totalement inutile.
L’autre frein principal c’est la peur du jugement. A force de s’entendre dire : « ça ne marchera jamais, c’est trop cher, on ne l’a jamais fait, on l’a déjà fait et ça n’a rien donné, ce n’est pas adapté, c’est impossible, … », on finit par s’autocensurer et s’entendre dire « il ou elle n’est pas créatif ».
Alors, on pourrait donner ici une autre définition de la créativité : la créativité c’est la capacité (individuelle comme collective) à sortir d’un système de référence. Sortir d’un système dans lequel on s’enferme, parfois sans s’en rendre compte, et qui limite le champ des possibles, sortir des habitudes, du formatage de l’école comme de la société, des contraintes que l’on se fixe soi-même, des « autoroutes de la pensée » ou de la « fixation », etc… Et sortir d’un système pour changer le regard, pour voir les choses autrement, pour trouver des idées nouvelles et les concrétiser pour changer la réalité… Changer le regard pour changer la réalité en travaillant autrement !
La situation semble désespérée ? Mais non, il est possible de développer cette aptitude à penser « hors de la boîte », en activant trois leviers : un levier individuel, à travers des attitudes et comportements, un levier collectif, à travers un climat, une ambiance et un cadre, et un levier méthodologique, à travers un processus et des méthodes ; et enfin, pour faire fonctionner tout cela en groupe, car cela ne fonctionne pas tout seul, il faut un animateur.
Comment développer la créativité ?
- Le levier individuel : quelles attitudes, quels comportements privilégier ?
D’abord solliciter mes trois personnages fétiches l’enfant, le poète et le fou qui sont en nous. Je précise tout de suite que ce sont des images, des métaphores, pas des zones du cerveau ! L’enfant c’est la spontanéité, l’émerveillement, l’enthousiasme, la curiosité, le jeu, (ceux qui me connaissent savent que j’apporte toujours mes legos), le poète c’est l’émotion, le rêve, la sensibilité, (mes outils de base ce sont de grandes feuilles de format A3 de couleur et des feutres de toutes les couleurs pour permettre aux participants de s’exprimer, également j’apporte également des images, des revues pour en découper), le fou c’est la prise de risque, l’audace et la capacité à ignorer les règles établies, à aller où les autres ne vont pas.
Mais il y a aussi un quatrième personnage qui est en nous, le logicien, c’est-à-dire celui qui met en avant la raison, le jugement, l’expertise. C’est celui qui dira « c’est impossible, il n’y pas de budget, … ». Celui-là, il faut le neutraliser, au moins provisoirement.
Des preuves ? En voilà trois issues de mon expérience personnelle de consultant en créativité.
L’enfant. Justement, le projet était le renouvellement de la Cité des Enfants, l’espace permanent d’expositions pour enfants à la Villette. J’animais un groupe projet composé de personnes d’un très haut niveau intellectuel: psychanalyste, sociologue, scénariste de bandes dessinées, architecte, designer….
Tous des cerveaux, des bac + 18, mais plus enclins à dire qu’à faire, à débattre qu’à produire des idées. Et ça s’est débloqué lorsque je leur ai mis en main des legos, de la pâte à modeler, des images à découper dans des revues, comme à la maternelle, et que je leur ai demandé de représenter la Cité des Enfants telle qu’ils la rêvaient et de la scénariser. Et aujourd’hui, la Cité des Enfants actuelle reproduit quasiment à l’identique l’un de leurs scénarios.
Le poète. Là j’étais avec un groupe d’ingénieurs, de techniciens, de cadres de la Direction Industrielle d’une société de catering, c’est-à-dire de repas pour les avions. Il s’agissait de réfléchir à l’évolution de leur outil industriel. La réunion avait mal commencé: des planches power point, avec des graphiques, des courbes, des simulations, des ratios, des tableaux Excel…. Le déblocage créatif est venu lorsque les leur ai mis en mains mes feuilles de format A3 colorées, et mes feutres de toutes les couleurs, en leur demandant de représenter leur outil industriel idéal dans l’avenir. « On ne sait pas dessiner », ont-ils dit. « Mais je ne vous demande pas de dessiner, mais de représenter » ! L’ambiance a radicalement changé, il y a eu du contenu qu’ils ont pu exploiter.
En devenant poètes, ils ont su créer.
Le fou. Je me souviens de cette séance où il fallait imaginer un dispositif pour protéger les organes internes d’un lecteur de cartes de format cartes de crédit des agressions, du vandalisme, de la fraude. Le groupe tournait en rond, ça devenait même conflictuel. J’avoue que la séance de créativité a eu lieu après un dîner bien fourni et, oserai-je dire, bien arrosé! Alors nous avons déliré à partir d’une analogie avec la ceinture de chasteté! Un vrai délire, je ne vous dis pas les dessins ! La Direction de l’entreprise serait passée par là, elle aurait dit: » Des Mesnards, à la niche, nous ne travaillerons plus avec vous, ce n’est pas sérieux ». Eh bien ce fut sérieux: la séance nous a inspiré un dispositif qui a fait l’objet de plusieurs brevets, et qui marche toujours.
Alors, pour être créatifs, osons réveiller l’enfant, le poète et le fou qui sont en nous. Qu’ils osent dire au logicien « Lâche nous les baskets, laisse nous jouer, rêver, délirer ». Tu reprendras tes droits à la fin, lorsqu’il faudra concrétiser, revenir à la réalité; là, on aura besoin de tes capacités de jugement. Vas te reposer un peu, ça te fera du bien, fais nous confiance. Tu verras, tu seras surpris du résultat: non seulement ça marche, mais en plus c’est un vrai plaisir ! Alors, pourquoi s’en priver ? C’est ça la créativité !
- Le levier collectif : quel climat, quel cadre établir ?
Les mots clés qui caractérisent ce climat : la liberté, le non-jugement, l’écoute et l’association sur les idées des autres, la joie et le plaisir, l’énergie et la volonté d’aboutir, le lâcher prise, et la confiance
- Le levier méthodologique : la créativité s’inscrit dans un processus et met en œuvre des méthodes spécifiques
Le processus de créativité
La créativité, contrairement à une idée reçue, ce n’est pas le chaos, la liberté totale, elle s’inscrit dans un processus organisé où vont jouer mes 4 personnages. Il peut se pratiquer au niveau individuel, comme au niveau collectif, dans le cadre de l’animation d’un groupe constitué, à la demande d’un commanditaire qui a un défi à relever et qui a besoin d’idées nouvelles. Le processus que je pratique se déroule en trois phases : Imprégnation, Illumination, Cristallisation. Dans la littérature, il y a parfois 4, 6, 9, 12,.. Je reste ternaire.
- L’imprégnation
C’est le début du processus, qui est motivé par le fait qu’on ne fait pas de la créativité comme cela, on ne part pas de rien. On part d’une question, qui est relative à un problème, ou à un défi, une envie, un manque, un besoin. Bref une motivation qui nous amène à dire : il faut trouver des idées pour résoudre cette problématique. Et le premier acte, c’est de bien formuler la question, de bien la poser, car la plupart du temps les questions sont mal posées, les problèmes mal formulés, et souvent déjà en termes de solutions. Là, on fait jouer un questionnement qui permet d’échapper à cette fameuse fixation.
Et ensuite c’est s’imprégner, au sens d’une éponge, s’imprégner de la problématique, se l’approprier, non seulement intellectuellement, mais aussi émotionnellement et même dans les tripes.
- L’illumination
C’est l’image de l’ampoule que l’on associe à l’idée. C’est là que l’enfant, le poète et le fou s’éclatent ! C’est le feu d’artifice, la phase où les idées jaillissent, en toute liberté, et surtout où une idée en entraîne une autre ; c’est un jeu de rebonds, d’associations, dans une ambiance énergique et euphorisante qui fait qu’il n’y a pas de censure, qu’on s’exprime en toute liberté et que les idées foisonnent. C’est la divergence…
- La cristallisation
C’est la phase où les idées vont prendre corps, se matérialiser, comme un beau cristal.
On n’en reste pas à une liste d’idées, il faut converger, c’est-à-dire sélectionner les idées en relation avec l’imprégnation, celles qui correspondent le mieux à la problématique, sélectionner les coups de cœur, les idées qui font vibrer, celles qui font briller les yeux en les lisant, et les approfondir sur un support, une « fiche idée » qui décrit les idées avec leurs bénéfices et leurs difficultés d’application. Là le logicien reprend ses droits. Et le résultat de cette cristallisation c’est un nombre limité (en général de 5 à 10) d’idées concrétisées en plus de ce que j’appelle la « baignoire » des idées qui peut en contenir des dizaines, voire des centaines.
Les méthodes de créativité en phase d’illumination
De nombreuses méthodes, qui se pratiquent en groupe, ont été développées pour stimuler la créativité en facilitant les attitudes et comportements requis pendant la phase d’illumination. On en compte au moins une bonne quarantaine
La plus connue est le Brainstorming (ou Remue-Méninges) dont les deux principes de base sont : le jugement différé (aucune censure ni critique n’est tolérée pendant la séance), et l’association d’idées (écouter et « piller » les idées des autres pour en trouver de nouvelles). Régulièrement je constate une vraie entreprise de « brainstorming bashing » dans des revues, des articles, des livres : c’est inefficace, c’est moins créatif que la réflexion individuelle, … Oui, ce n’est pas nouveau. Je peux simplement témoigner que lorsque le brainstorming est bien fait – et c’est là que c’est délicat – il est très efficace.
D’autres méthodes se pratiquent aussi :
- L’éloignement créatif, où la prise de recul pour échapper à la fameuse fixation est facilitée par la transposition du sujet à des domaines analogues, réels ou imaginaires ; une façon plus facile est tout simplement de transposer le sujet en son inverse ! Mais il ne faut pas oublier, dans ces méthodes, le retour au réel !
- L’identification, où les participants s’identifient à un aspect du sujet et en vivent les différentes composantes sous forme de jeux de rôles improvisés
- La « bisociation » ou croisement, où la créativité est stimulée par le rapprochement forcé d’éléments appartenant à des domaines totalement étrangers, par exemple des images, mais aussi des odeurs, des sons, des surfaces à toucher, même des saveurs à goûter ; bref on stimule les sens
- La projection où l’on invite les participants à représenter leur vision de la situation idéale sous forme d’images, de dessins, de montages en pièces de legos ou autres
Le groupe et le rôle de l’animateur
Tout cela se pratique donc en groupe : un groupe diversifié, avec des participants motivés, pas trop nombreux (12 c’est un maximum). Bon, je l’ai fait une fois à 80, mais ce n’est pas top. Là il y a d’autres formules d’intelligence collective pour les grands rassemblements : forum ouvert, worldcafé,…
Et pour mettre en œuvre ce processus, pour créer et maintenir ce climat, pour faire appliquer ces méthodes, le rôle de l’animateur est essentiel : stimuler, encourager, faire respecter les consignes, mais sans influencer ni manipuler, ce qui peut se résumer dans la posture suivante : « directif sur la forme, non directif sur le fond ».
Voilà donc les outils, le « comment » pour révéler et exploiter (au bon sens du terme) le trésor dont je parlais.
Avant de voir comment nous mettons ce « comment » en œuvre à l’UPR Créativité, je voudrais parler d’un créateur bien connu ! Wolfgang Amadeus MOZART. On se le représente habituellement comme créant dans l’instant sous la dictée de Dieu. Or il appliquait spontanément un processus analogue : d’abord, quand il recevait une commande, il s’imaginait l’ambiance dans laquelle l’œuvre serait créée, puis il sortait de chez lui et les idées musicales lui venaient, souvent inspirées par ce qu’il voyait, entendait, ressentait (les secousses de la voiture par exemple), il les recevait sans les rejeter, les combinait, et l’œuvre se construisait progressivement dans sa tête jusqu’à ce qu’il en ait une perception globale, et alors il retournait pour l’écrire, et il précisait : « C’est un régal ! ». Bien sûr tout cela est dit avec mes mots, mais l’on peut reconnaître l’imprégnation ; l’éloignement, la non censure et l’association d’idées et la cristallisation. Alors ce que nous faisons avec le processus de créativité, c’est de modéliser le fonctionnement naturel des grands créateurs pour le reproduire.
Et je vous cite la conclusion d’un participant à une session : « je retiens deux choses, d’abord qu’on peut créer sans la douleur, ce qui est très important dans notre civilisation, et puis qu’il existe des méthodes rationnelles de stimulation de nos capacités créatrices ».
Alors voici le moment de vous présenter l’UPR créativité
Présentation de l’UPR créativité
Qui, quoi, pourquoi, comment ?
Qui ? Formellement il y a moi-même, Président, Line, rapporteuse, pardon, rapporteur général, mais aussi s’y associe un premier cercle issu d’autres composantes de Galilée.sp : Catherine, Laurence, Anne-Marie.
L’UPR créativité c’est le bras armé de Galilée.sp en termes de créativité, c’est une UPR de service, au service des autres : Galilée.sp dans son ensemble, les autres UPR, mais aussi des entités extérieures dans le domaine public.
Bras armé pour quoi ? Pour permettre à Galilée.sp de réaliser ses missions au mieux : elles ont été définies comme : éclairer, inventer, mobiliser pour promouvoir un service public efficace, innovant, humain. ; j’avais proposé « et sexy », mais mon président, Gilbert, me l’a fait enlever !
L’UPR créativité offre deux types de services : formation et interventions.
Formation, formations à la créativité : la palette est large : sensibilisation sur 1h30 au minimum, aussi sur une demi-journée, avec plus de pratique, formation de base sur 2 jours, et perfectionnement à l’animation sur 2 jours de plus.
A ce jour, depuis 2015, 130 personnes y sont passées, de Galilée.sp bien sûr, mais aussi de notre partenaire la Casden, du RECIFE, le réseau de coachs des services publics de l’Île de France, avec des personnes de la Ville de Paris, des conseils généraux de 95 et 91, et, via l’Executive Master CATOP (coaching et transformation des organisations publiques) de l’Université Paris Dauphine, initié par Catherine, des personnes de type directeur d’hôpital, magistrat, …
33 personnes ont suivi la formation de base de 2 jours, dont 11 qui ont suivi le cycle complet de 4 jours, parmi elles, Line, Catherine, Laurence et Anne-Marie.
Les interventions : c’est le moment de vous parler des L.I.I.s. En effet, à Galilée.sp, du moins à l’UPR créativité, on va au L.I.I., on travaille au L.I.I.
L.I.I., ça veut dire Laboratoire Incubateur d’Idées. Le concept est né au cours d’une formation, il est devenu une exclusivité Galilée.sp, il a même été déposé.
C’est un atelier de créativité dont la promesse est : « Vous venez avec un problème, vous repartez avec des solutions concrètes dont la mise en œuvre est à votre portée ».
Le mieux est de raconter une expérience.
Lors d’un petit déjeuner comme celui-ci (mais en présentiel), une personne nous approche et nous dit : « Voilà, je m’appelle Annick, je suis enseignante en BTS de Commerce International, j’ai un souci, peut-être pourriez-vous m’aider. Les étudiants de mes classes, qui sont par définition d’origine très diverses, ont tendance à se regrouper par affinités culturelles. Ce n’est pas du communautarisme, ni de l’idéologie, mais c’est par facilité, et je trouve que c’est dommage qu’ils ne vivent pas ainsi la diversité au quotidien. Je voudrais leur faire vivre justement ces valeurs de diversité, mais je ne sais pas comment m’y prendre ». Alors nous lui avons proposé d’aller au LII. D’abord j’ai eu un entretien avec elle pour bien formuler le sujet (c’est la phase d’imprégnation), et bien en définir les contours. En particulier elle a précisé qu’elle n’avait pas de moyens budgétaires et qu’elle cherchait des solutions applicables « au quotidien » sans avoir à demander l’aval de la hiérarchie. Et nous avons ensemble constitué le groupe : il y avait des étudiants, des enseignants (dont elle-même) et des participants « hors du cadre » : un délégué syndical et des personnes de Galilée.sp. Cela faisait 11 personnes. Nous nous sommes réunis un samedi matin, dans un lieu « hors du cadre » (c’est important). C’est moi qui ai animé la séance : j’ai d’abord rappelé le sujet, les règles du jeu, chacun s’est présenté de façon créative avec mes fameuses feuilles A3 de couleur comme support, puis nous sommes rentrés dans l’illumination : je leur ai demandé d’abord s’ils avaient déjà des idées en tête (c’est ce qu’on appelle une Purge), et ils en avaient plein – je suis toujours étonné de ce constat : les gens ont plein d’idées, mais ils ne les expriment pas spontanément. Puis nous avons pratiqué l’inversion : comment faire pire -avant de faire mieux – très productif, et ensuite ils ont, par petits groupes, imaginé et représenté, toujours sur des feuilles A3, la classe idéale. Et venu alors le temps de la cristallisation, nous avons convergé de 56 à 6 idées concrètes, dont au moins 3 ont été appliquées dans la foulée : le L.I.I. s’est tenu en décembre, les idées appliquées à la rentrée de janvier. Satisfaction complète des participants et de la commanditaire.
Un autre exemple : toujours lors d’un petit déjeuner, un ancien inspecteur des finances, maintenant à la retraite nous explique que, préoccupé par le logement des jeunes fonctionnaires (il y a des infirmières ou des policiers qui dorment dans leur voiture car ils n’ont pas les moyens de se loger), il a fait, avec une collègue, un rapport officiel qui montre qu’il y a des solutions : il y a des terrains publics, de l’argent disponible, des besoins … et rien ne se passe. Ce rapport a circulé dans les ministères, on le félicite, on le remercie, et… rien ne se passe. Le rapport est « encarafé », dit-il ! Nous convenons de faire un L.I.I. pour « désencarafer » ce rapport, il en sort un projet piloté par un groupe et aujourd’hui, 3 terrains d’un grand ministère vont être mis à disposition, un investisseur mutualiste est prêt à investir et une structure est en cours de constitution. Ce qui est intéressant ici c’est la mise en œuvre des idées, là on est dans l’innovation.
Dans ces deux exemples de L.I.I., il s’agissait bien de trouver des solutions à un problème ; il y a en a eu d’autres, pour la Chambre des Métiers et de l’Artisanat de Paris, pour la DIAIR , la délégation à l’intégration et à l’accueil des réfugiés du Ministère de l’Intérieur, et, tout récemment, par ZOOM (car cela marche aussi à distance), pour Galilée.sp : comment continuer à réaliser nos missions pendant le confinement ; il en est résulté le nouveau site, la création d’une nouvelle UPR, VIE, de nouveaux articles, les apéri-musique, les petits déjeuners sur ZOOM (dont celui-ci), un webinar, des corners, un futur forum ouvert, … ça, ce sont des idées mises en pratique, c’est-à-dire de l’innovation !
Il y aussi un autre modèle de L.I.I., celui de la Vision partagée : là on cherche à élaborer une vision du futur idéal. Nous l’avons fait pour Galilée.sp (avec comme résultat la clarification des missions), pour le service public idéal dont nous avons réalisé une fresque (y compris au sens propre, physiquement).
Et aussi pour l’ENA. Voilà l’histoire : les Gilets Jaunes font remonter des récriminations contre les élites et l’école qui les forme, l’ENA. Du coup, on dit « on supprime l’ENA ou plutôt on la réforme et on charge un haut fonctionnaire, Frédéric Thiriez, de la mission ». La belle affaire. C’est la pire façon de poser le problème, ce que j’appelle l’autruche turbo : un problème, vite la première solution venue. Or Galilée.sp avait organisé un petit déjeuner avec Daniel Keller, qui est président de l’association des anciens élèves de l’ENA. A l’issue de ce petit déjeuner, piqués au vif, nous décidons de nous saisir de cette question. Première étape donc, bien formuler la question : ce n’est pas supprimer ou réformer l’ENA, mais quelle formation pour les dirigeants publics de demain, mais alors la question se pose de quels dirigeants publics auront nous besoin, le problème change de niveau, j’appelle ça remonter le ludion, et même la question finale c’est pour quel service public demain ? Là heureusement nous en avions fait la fresque. Alors nous avons réuni un groupe, imaginé le portrait-robot de ce dirigeant public de demain (qui sera aussi une dirigeante), et à partir de là la formation et l’accompagnement dont il ou elle aura besoin. Et nous avons envoyé notre contribution au haut fonctionnaire responsable du projet.
Voilà pour les L.I.I.s, avec le L.I.I. solutions à un problème et le LII vision du futur. Nous avons mené au total, depuis 2014, 23 interventions qui ont impliqué 500 personnes, dans des groupes de 6 à 180 participants.
En conclusion, je voudrais dire :
- Que la créativité c’est du réel, ça marche, et en plus dans la bonne humeur et le plaisir
- Que Galilée.sp dispose des outils pour faire advenir ce service public de demain, efficace, innovant, humain et sexy : les L.I.I.s.
Galilée.sp y est légitime et y est prêt.
Je vous remercie et j’attends vos questions et vos commentaires.
Mais avant, Line, toi qui as été formée, qui a monté et animé des groupes, qui a participé à des opérations emblématiques (la DIAIR, l’AATF,…), voudrais-tu témoigner ?
Après ce témoignage et le traditionnel échange de questions-réponses, rendez-vous est pris pour septembre avec de nouveaux projets de petits déjeuners… En format ZOOM, mais aussi, nous l’espérons, en format PRESENTIEL !!!